Introduction

Cette série de livres m’a été conseillé par mon libraire alors que je cherchais de la lecture sur Henri IV et il m’a été de bons conseils, comme la plupart des libraires que j’ai connus, en me vantant les talents d’écrivain de son auteur, Robert Merle, ainsi que l’originalité de cette œuvre écrite en utilisant le français de l’époque et, enfin, que cela permettait d’apprendre l’Histoire de France depuis Henri II jusqu’à Henri IV et même au-delà. Il n’en fallait pas plus pour me convaincre d’acheter le premier tome et je ne fus pas déçu, avalant quasiment un tome par mois en étant seulement interrompu pendant mon voyage en Eurasie.

J’ai toujours été passionné d’Histoire et de livres traitant de ces sujets (romans, biographies) donc je me suis dit que ce pourrait être intéressant d’en faire un article sur mon blog pour partager cette passion en espérant qu’elle vous captive autant que moi !

De plus, même si vous n’en tirez pas de leçons, cela vous permet de développer votre savoir et, surtout, quand l’Histoire est racontée de manière aussi immersive que dans ce roman, c’est souvent très distrayant et cela vaut bien des romans, des films ou des séries de fiction en termes d’actions, de rebondissements, de complots et d’émotions. Alors, laissez de côté « Games of Thrones » et plongez avec moi dans ce monde nouveau !

Une saga historique dans la France du milieu de la Renaissance pendant les guerres de religions

Robert Merle est né en 1908, il a fait des études de philosophie puis il a été professeur agrégé d’anglais. Engagé dans l’armée française en 1939, il est fait prisonnier à Dunkerque en 1940 lors de l’encerclement par les allemands alors qu’il cherchait à rejoindre l’Angleterre, expérience qui lui inspirera le roman « Week-end à Zuydcoote », prix Goncourt en 1949 et adapté au cinéma avec Belmondo dans les années 60. Robert Merle est libéré en 1943 et reprend son activité de professeur d’anglais et d’écrivain, il fut membre pendant quelques années du parti communiste à la fin des années 70 avant de le quitter suite à l’invasion de l’Afghanistan. Arrivé à l’âge de la retraite, il se lance dans l’écriture de cette longue saga historique dont les six premiers tomes sont publiés de 1977 à 1985 puis, le succès populaire étant au rendez-vous, Robert Merle rédigea sept tomes supplémentaires de 1991 à 2003, le récit se terminant à l’avènement de Louis XIV. L’auteur décèdera un an à peine après la parution du dernier tome, en 2004.

Le récit historique de Fortune de France alterne entre les petites histoires et la grande Histoire de France qui sont étroitement liées et où la fortune (dans le sens de destin) de la France dépend à la fois du hasard, de coups du sort, d’aléas météorologiques (sécheresses, tempêtes), d’épidémies de pestes mais aussi des décisions et des actes de multiples personnages de plus ou moins grandes importances qui évoluent à différents niveaux, dans l’ombre ou dans la lumière (parfois les deux), dans le luxe ou la misère, dans le fracas des armes ou dans la douceur des salons.

On y côtoie de grands personnages historiques et d’autres moins importants qui sont pour la plupart fictifs mais qui permettent de donner vie au récit. C’est une saga historique volumineuse relatant les nombreux conflits qui opposèrent les français entre catholiques et protestants à partir de la fin du règne de François Ier au milieu du XVIème siècle et se prolongèrent sur des décennies.

Le personnage principal, Pierre de Siorac, est fictif, il est issu d’une famille dont le père est protestant, anobli et enrichi pour faits d’armes dans les armées du roi de France, et d’une mère catholique issue d’une ancienne lignée de nobles. Pierre de Siorac nait en 1551 au château de son père dans le Périgord et il va y vivre toute son enfance alors que les premières guerres de religion entre catholiques et protestants se déclenchent en France. Puis, il fait des études de médecines à Montpellier avant de monter à la capitale où il est le témoin du massacre de la Saint Barthélémy.

Après s’être réfugié quelques temps dans son Périgord natal, Pierre de Siorac revient à Paris où il deviendra un des médecins du roi Henri III puis une sorte d’agent secret royal dont les missions vont l’impliquer au cœur des grands évènements qui déchirent le royaume de France entre catholiques et protestants avec la participation de puissances étrangères. Pierre de Siorac va voyager dans toute la France ainsi que dans les grandes capitales européennes, il prolonge ses services sous le roi Henri IV en devenant un personnage de plus en plus important puis, lorsque la France est réunifiée et pacifiée avec la promulgation de l’Edit de Nantes par Henri IV en 1598, il prend ses quartiers dans ses terres afin de rédiger ses mémoires qui constitueront les six premiers tomes de cette saga.

Cette œuvre permet de découvrir certains épisodes et personnages de l’Histoire de France que je connaissais mal ou peu bien qu’ils aient eu une influence importante sur le cours de l’Histoire de France, notamment les rois de France Henri III et Henri IV ainsi que leurs ennemis les plus farouches à savoir la Ligue catholique et le roi d’Espagne Philippe II . Certains personnages historiques tels Henri III et IV nous deviennent même attachants du fait de partager leur intimité.

J’avais l’image de la royauté française qui régnait de manière immuable et sans contestations sur un pays uni et docile telle qu’à l’époque de Louis XIV, François Ier ou Saint Louis…mais on en est bien loin. On retrouve la période de chaos et de guerres internes et externes telles que pendant la Guerre de Cent Ans, très bien décrite dans la saga historique passionnante des Rois Maudits.

Ce récit est raconté à travers le personnage de Pierre de Siorac qui évolue dans des milieux sociaux et des lieux très différents. Il est le témoin de grands évènements historiques mais aussi de simples anecdotes de la vie de tous les jours de la population qu’il nous décrit avec les éléments qui sont à sa disposition, donc à la fois précis mais parfois incomplet. Ce type de narration permet de s’immerger complètement dans cette époque, de mieux comprendre ce qui anime la population à tous les niveaux de l’échelle sociale, les passions et les tracas de la vie du quotidien, le contexte dans lequel se déroule les événements historiques qui, bien souvent, se résument à quelques dates de batailles, de traités, de mariages et de couronnements dans nos manuels d’Histoire.

Ce récit donne souvent la parole aux gens du peuple et pas seulement aux grands nobles, notamment dans les premiers tomes. Il m’est arrivé parfois de regretter de ne pas avoir plus de détails sur des grands personnages ou évènements historiques comme c’était le cas dans l’autre grande saga historique des Rois Maudits mais c’est aussi l’occasion de découvrir la vie des gens plus ordinaires qui est à la fois difficile mais aussi source de satisfactions, de joies, de fêtes, d’humour, cela ne se résume pas qu’aux travaux des champs et aux prières. Néanmoins, ils subissent principalement l’Histoire et bien souvent ne peuvent que suivre ce qui la font.

Dans cette œuvre, nous sommes loin des récits épiques de grandes batailles ou d’actes héroïques surhumains que l’on peut avoir dans des romans de caps et d’épées où une poignée de combattants peut quasiment mettre en déroute une armée entière à grands renforts d’explosions et de bottes secrètes. Toutefois, ces intrigues discrètes, ces victoires indécises sur des lignes de fronts confuses où les alliances se font et se défont dans des territoires aux frontières morcelées, c’est également passionnant à suivre car c’est l’Histoire de France avec ses petits et hauts faits et puis, je vous rassure, il y a quand même quelques combats d’épées qui sont divertissants tout en restant réalistes.

L’originalité de ce récit est que l’auteur utilise le vocabulaire de l’époque qui est globalement assez proche du français actuel ou du moins compréhensible avec le contexte même s’il est parfois nécessaire de se référer au glossaire du livre pour la définition de certains mots. Le personnage principal étant originaire du Périgord, il y a également quelques mots de la langue d’oc qui sont utilisés.

Je vous livre ci-dessous quelques exemples truculents d’anciens mots français et d’oc qui sont utilisés fréquemment dans le récit et qui nous deviennent rapidement familiers sans avoir besoin de se référer au lexique. Bien au rebours de rendre la lecture du récit plus difficile, l’usage de ces mots permet de mieux s’immerger dans cette époque en retranscrivant plus fidèlement les mentalités et les caractères des différents personnages dans les mots qu’ils emploient.

S’accoiser : se taire
Alberguiere: aubergiste
Apazimer (oc) : s’apaiser
Atendrézi (oc) : attendri
Chiche-face : avare
Coqueliquer : faire l’amour
Dépêcher : tuer
Garce : fille (non péjoratif) / Gautier ou Guillaume : homme
Incontinent : immédiatement
Pâtiment : souffrance
Navrure: blessure
Pimplocher: se farder (se maquiller)
Peux-je : puis-je

C’est aussi l’époque des premiers écrivains français tels Rabelais, Montaigne ou La Boétie qui s’expriment et développent leurs pensées dans cette jeune langue tout juste officialisée par François 1er en 1539 par l’ordonnance de Villers-Cotterêts. Ces auteurs donnent à la langue française ses premières lettres de noblesse en popularisant son riche vocabulaire, en construisant de belles et intelligibles tournures de phrase.

Les dialogues dans ce récit sont également très bien écrits, c’est du beau français agréable à lire avec des phrases bien construites, un vocabulaire varié et précis, une formulation élégante en maniant à la perfection l’ironie et les doubles sens qui peuvent signifier des grossièretés sans employer de mots grossiers, c’est un peu comme écouter du Georges Brassens.

On se croirait aussi parfois dans une pièce de théâtre de Molière avec de belles et longues tirades car, à la cour du roi de France, il convient de maîtriser à la perfection l’art de manier la langue autant que l’épée, un bon mot pouvant vous apporter autant de gloire ou de malheur qu’un coup de sabre.

Parfois, des longues descriptions ou des dialogues de peu d’importance sur la vie de tous les jours peuvent devenir lassants ainsi que les histoires d’amours à répétition du personnage principal Pierre de Siorac qui rencontre toujours une charmante dame célibataire où qu’il se trouve et quelque soit son statut social telles une chambrière, une drapière ou une noble dame mais ce n’est peut-être que de la jalousie mal placée 😊

Toujours est-il qu’il m’est arrivé de sauter parfois quelques pages du récit, ce que généralement je me refuse à faire pour toute lecture, mais il s’agit quand même d’une saga de six tomes de plus de six cents pages chacun….

On prend conscience également de la lenteur extrême des déplacements et de la circulation de l’information à cette époque qui se faisaient principalement à cheval ou même à pied. Les gens étaient informés de ce qui se tramait dans le royaume et au-delà mais avec une grande latence, la rapidité et la qualité de l’information était aussi un enjeu important pour les puissants afin de prendre les bonnes décisions le plus rapidement possible avant leurs opposants.

Les catholiques ont souvent dans ce récit le mauvais rôle, étant les dominants et les protestants sont plutôt vus sous un meilleur jour, étant souvent minoritaires et dominés même s’il y a des exemples de bonnes et mauvaises actions de chaque côté. Pour avoir fait quelques recherches sur certains faits et personnages en dehors de ce récit, Robert Merle semble néanmoins se baser principalement sur des faits historiques indiscutables autour desquels il invente certaines histoires mais qui sont en second plan et qui n’ont pas d’incidences majeures sur l’Histoire en premier plan.

Il faut de toute manière croiser les sources pour avoir une vision la plus complète en confrontant les avis tout en se concentrant le plus possible sur les faits sachant qu’il y a toujours un biais dans la manière de raconter l’Histoire en passant sous silence certains actes, en s’attardant sur d’autres, en interprétant certaines actions ou paroles.

Nous restons des humains et l’Histoire est si riche en évènements et en détails de tous genres, c’est le travail des historiens professionnels ou amateurs passionnés d’être capable avec une extrême rigueur et honnêteté intellectuelle en dépit de leurs convictions politiques ou idéologiques d’en extraire la substantifique moelle afin de déceler un fil conducteur pour expliquer l’enchainement des évènements en identifiant les éléments déclencheurs mais il y aura toujours diverses interprétations et théories possibles.

Personnellement, j’apprécie beaucoup les romans historiques ou les biographies (notamment celles de Stephan Zweig qui est pour moi une référence) comme moyens d’apprentissage de l’Histoire car c’est plus compréhensif et distrayant que de retenir par cœur dans des manuels une succession de dates sans forcément faire le lien entre eux sauf si le professeur permet de combler les trous ou en complétant avec ses propres recherches.

La description du contexte de l’époque, des personnalités et du vécu des divers personnages majeurs permet de mieux comprendre les enjeux et certaines prises de décisions dont les mécanismes sont assez souvent similaires quelques soient les époques pour peu que l’on fasse abstraction de certains éléments anecdotiques et en faisant quelques analogies. Toutefois, cela nécessite que l’auteur soit rigoureux et le plus honnête possible pour ne pas inventer des faits ou surinterpréter afin de plaire davantage à son lectorat, c’est un risque et puis il faut aussi être prêt à y consacrer du temps.

L’enseignement de l’Histoire n’est pas une science exacte, seuls les faits sont indiscutables, pour l’identification des causes et les conséquences il y a matière à interprétation. J’exprime ici un avis personnel basé sur mes réflexions en tant que simple passionné d’Histoire, je ne prétends pas avoir la vérité donc si vous souhaitez partager votre avis sur la question, n’hésitez pas à le faire en commentaire de cet article ou bien en m’envoyant un message privé. Le débat et la confrontation des idées permettent de clarifier son avis et d’augmenter le savoir de chacun.

Enfin, je reste impressionné par la capacité de l’auteur Robert Merle d’avoir écrit ces treize tomes volumineux, extrêmement bien écrits et documentés en l’espace de vingt-cinq ans soit une cadence d’environ un tome tous les deux ans ! Robert Merle a accumulé un savoir encyclopédique sur de multiples faits historiques, des grands personnages, différents corps de métier, la mode vestimentaire, les objets du quotidien, l’architecture, le vocabulaire et il a su le retranscrire ensuite de manière lisible et cohérente sans trop l’étaler. Il a su tisser l’histoire de ses personnages fictifs autour d’évènements historiques soigneusement sélectionnés et bien expliqués, c’est un coup de maître que j’admire !

Descriptif de chaque tome

Si vous souhaitez lire cette saga, je préfère vous prévenir que la suite de cet article va vous donner des éléments de chaque tome en s’attachant surtout aux faits historiques sans vous révéler néanmoins les principales intrigues des personnages fictifs. Toutefois, si vous voulez garder la surprise totale, mieux vaut attendre de lire chacun des tomes avant de lire la suite.

Si vous ne pensez pas avoir le temps ni l’envie de les lire, alors les descriptions ci-dessous peuvent vous donner un résumé tout en apprenant certains faits parfois peu connus de l’Histoire de France. Je m’attacherai ici à relever les sujets historiques qui m’ont particulièrement intéressé tout en essayant de vous partager une vue d’ensemble.

Pour vous aider à vous y retrouver, j’ai fait la frise chronologique ci-dessous avec l’aide du site internet http://www.frisechronos.fr/

Frise chronologique de la saga historique Fortune de France

Tome 1 : « Fortune de France », l’émergence du protestantisme

La vie des sujets et des suzerains au château dans le Périgord

Le premier tome commence lorsque Jean de Siorac, le père du personnage principal Pierre de Siorac, se retire de ses charges militaires après avoir été anobli pour ses hauts faits et en ayant amassé une petite fortune grâce aux prises de guerre. Il est accompagné de son fidèle frère d’armes, dénommé Sauveterre, avec lequel il est lié par un pacte d’amitié peu commun stipulant qu’ils partageraient et administreraient ensemble tous leurs biens, on surnomme ainsi leur duo atypique « la Frérèche ».

Ils achètent le château de Mespech situé dans le Périgord à proximité de la ville de Sarlat dont ils renforcent les fortifications et ils achètent des terres autour pour cultiver de quoi subvenir aux besoins de leur famille et de leur personnel ainsi que pour générer des revenus en revendant les surplus. Jean de Siorac fait la rencontre d’une jeune femme d’une ancienne lignée de noblesse catholique dont il tombe amoureux et, malgré leurs différents religieux, ils se marient ensemble.

Ce tome décrit avec beaucoup de détails la vie des gens dans le château (chambrières, paysans, artisans, gardes) et les activités qu’ils effectuent (travaux des champs, construction, cuisine, réceptions, protection) sous le commandement de leurs suzerains. En bons huguenots (équivalent de protestants), la frérèche est économe sur ses dépenses et fait des investissements judicieux pour accroitre ses revenus et faire fructifier ses richesses en achetant d’autres fermes ou en produisant des objets à valeur ajoutée (paniers en osier, tonneaux en bois…).

Pierre, le personnage principal naît au château en 1551, il est le cadet de la famille, il reçoit une éducation protestante de par son père et son oncle Sauveterre mais sa mère insiste pour qu’il porte un médaillon de la Vierge Marie au grand damne de la frérèche qui juge que c’est un objet idolâtre. Ce médaillon lui permettra néanmoins de se sortir de certaines situations périlleuses dans ses missions futures.

Conversion de masse du personnel du château avec revue des avantages et inconvénients du protestantisme

Alors qu’ils sont bien installés dans leur domaine avec leur personnel et leur famille qui s’est agrandit au fil du temps et tandis que des échos de tensions et de persécutions religieuses parviennent régulièrement à leurs oreilles, la frérèche estime qu’il est désormais temps de se positionner en se déclarant publiquement de la religion protestante. Avant cela, il leur apparait nécessaire que leurs sujets se convertissent également à leur religion pour leur sécurité ou bien ils devront s’en aller mais, à cette époque, ce n’était pas vraiment un choix libre pour le peuple étant donné les conséquences désastreuses s’ils perdaient leur moyen de subsistance. Ainsi, la grande majorité optait pour la religion de ses maitres avec les risques associés.

La frérèche organise plusieurs assemblées avec un ministre du culte protestant pour instruire à leurs sujets les fondements du protestantisme, ainsi c’est l’occasion de comprendre pourquoi il y a pu avoir de fortes oppositions et réticences de la part du peuple face au protestantisme pour des raisons parfois d’ordre sociale, affectif, ou symbolique davantage que religieux comme par exemple le fait que les huguenots ne reconnaissant pas le culte des saints catholiques alors que cela impliquait qu’une cinquantaine de jours chômés en l’honneur des plus illustres d’entre eux étaient annulés.

De plus, ces saints représentaient également pour le peuple une forme plus humaine et accessible que Dieu, ils pouvaient leur faire une prière et une offrande dans un but bien précis de manière similaire aux anciens dieux grecques et romains : il y avait le saint pour les objets perdus, un autre pour garantir un voyage en sécurité, les saints patrons de différents corps de métiers…

Le personnage de Marie était également très populaire dans la population car les femmes pouvaient plus facilement s’identifier à cette figure féminine et les hommes pouvait aussi y retrouver la représentation de leur mère, symbole de protection et de bienveillance.

Mais d’autres aspects du protestantisme pouvaient toutefois emporter l’adhésion ou du moins la compréhension du peuple : moins de rites à rémunérer au clergé, la fin du célibat imposé aux prêtres et aux moines qui n’était dans les faits pas toujours respecté, certains dogmes du catholicisme complexes à comprendre qu’il était donc plus facile de délaisser.

La grande Histoire de France de plus en plus inquiétante et menaçante

Assez logiquement, il y eut une forte opposition du clergé catholique à la Réforme protestante pour des motifs religieux mais aussi pour la perte d’influence et de revenus qu’elle engendrait, par exemple le commerce des indulgences étant remis en cause ainsi que les dons pour les saints ou lors des différents rites catholiques.

Des nouvelles du royaume de France parviennent par bribes au château de Mespech : à la mort du roi François Ier en 1547, son fils héritier Henri II lance des persécutions contre les protestants français qu’il suspend temporairement pour demander le soutien des nobles huguenots dans la guerre contre le roi d’Espagne Philippe II et ceux-ci acceptent en se joignant aux combats. Jean de Siorac répond à l’appel et il sera fait baron pour sa participation à la prise de Calais aux anglais en 1558 (à cette époque, la reine d’Angleterre Marie Tudor est mariée au roi d’Espagne Philippe II donc les deux pays sont alliés) sous les ordres du Duc François de Guise, un grand chef de guerre français mais adversaire farouche des protestants.

Au final, l’issue de cette guerre contre l’Espagne est défavorable à la France notamment après la défaite à la bataille de Saint-Quentin en 1557 malgré la résistance héroïque des maigres troupes du protestant français Coligny et elle doit abandonner à l’Espagne ses prétentions sur l’Italie.

Puis, le roi Henri II meurt accidentellement en juillet 1559 lors d’une joute, son œil est transpercé par un éclat de lance. Son jeune fils François II lui succède à l’âge de seulement quinze ans mais il est souffrant et il décède un an plus tard de maladie, son jeune frère Charles IX lui succède en 1560. Le royaume de France est désormais sous l’influence de la famille des Guise, ardents partisans de la lutte contre les protestants, et de la reine mère Catherine de Médicis qui oscille entre une attitude conciliante avec les protestants ou leur répression féroce.

La première guerre de religion éclate en France entre catholiques et protestants en 1562 du fait d’un massacre de protestants perpétrés sous les ordres du Duc François de Guise. Ce dernier sera ensuite assassiné par un protestant un an plus tard par vengeance.

La petite Histoire de France nous aide à relativiser la nôtre

Pendant cette période trouble de grandes tensions religieuses, surgit dans le sud de la France un épisode de grande sécheresse combiné à une résurgence de la peste. Sachant le peu de moyens connus à la Renaissance pour faire des provisions et pour lutter contre une épidémie extrêmement mortelle, notre ancienne situation de pandémie du Covid-19 couplée aux premières conséquences du réchauffement climatique sous fond de tensions internes et géopolitiques apparaît, pour le moment, bien faible, en comparaison de celle de la population de l’époque alors qu’ils n’avaient ni vaccins ni masques chirurgicaux et encore moins de frigos ou de climatiseurs !

Tome 2 : « En nos vertes années », découverte de la ville de Montpellier et des études de médecine à cette époque

L’état des connaissances en médecine avec des polémiques d’un autre temps

Dans ce second tome, Pierre de Siorac, âgé désormais de quinze ans, est envoyé par son père à l’université de médecine de Montpellier qui est considérée comme une « des plus anciennes et brillantes écoles de médecine du monde médiéval » (source Wikipédia). C’est donc l’occasion de découvrir à la fois la ville de Montpellier qui est dynamique et prospère ainsi que l’organisation et l’état des connaissances des études de médecine à cette époque qui sont bien loin de ce que nous connaissons aujourd’hui, fort heureusement pour nous.

Dans ce récit, on y apprend les polémiques faisant rage entre les partisans de l’étude exclusive des écrits des Anciens de l’Antiquité de manière quasi religieuse, notamment les œuvres issues des célèbres médecins grecs Galien et Hippocrate, et les professeurs qui souhaitent enseigner les récentes découvertes en anatomie humaine et en chirurgie basées sur l’expérience du terrain et notamment des champs de bataille.

Les médecins de la Renaissance doivent innover face à de nouveaux types de blessures engendrées par les armes à feux tel Ambroise Paré, chirurgien du roi, qui inventa notamment la technique de la ligature des artères pour stopper les hémorragies plutôt qu’une très douloureuse cautérisation au fer chaud. Il y a également André Vésale, illustre anatomiste de la Renaissance, originaire du duché de Brabant situé dans l’actuelle Belgique et qui fit ses études en anatomie à Paris puis en Italie. Vésale a grandement contribué à l’amélioration des connaissances de l’anatomie humaine grâce à des dissections sur des cadavres de condamnés qui ont contredit en partie ou ont complété les écrits anatomiques de Galien qui se basait essentiellement sur des dissections de singe, lui étant interdit à l’époque antique de la pratiquer sur des corps humains.

A cette époque, les chirurgiens sont dénigrés tels de vulgaires bouchers les mains pleines de sang et ne sont pas considérés par les professeurs comme de nobles médecins. L’hygiène, comme le lavage basique des mains et du corps, n’est pas non plus prise au sérieux. Pour améliorer ses connaissances en anatomie humaine, il fallait se résoudre à déterrer des corps du cimetière en pleine nuit pour faire des autopsies afin d’en apprendre davantage sur le corps humain ou de consulter en cachette des livres interdits documentés grâce à ce type d’expériences et qui pouvaient être diffusés à large échelle grâce à l’invention récente de l’imprimerie.

Pierre de Siorac fait la connaissance de ses camarades étudiants en médecine dont certains sont de joyeux lurons qui festoient et paillardent comme leurs futures descendants carabins mais la discipline est également stricte et les châtiments corporels fréquents.

On découvre aussi les fêtes populaires de la ville de Montpellier notamment les carnavals, la vie de la population en ville après la description de celle à la campagne dans le premier tome, les spécificités régionales en termes de gastronomie, d’architecture et de vocabulaire par rapport au Périgord natal du personnage principal.

L’imbrication des deux religions dans la société avec des exactions commises dans chaque camp

La religion protestante est bien implantée dans le sud de la France même si elle demeure largement minoritaire, les protestants sont présents dans les différentes strates de la société et certains ont accès à des responsabilités importantes tel le chef des gardes de la ville mais les tensions sont palpables entre huguenots et papistes (équivalents de catholiques).

Chaque camp est armé et défend vigoureusement sa religion, bien souvent aussi avec des intérêts plutôt matériels que spirituels comme cela est souvent le cas dans les guerres : les motifs réels des belligérants sont souvent d’accroître leurs terres ou d’obtenir une promotion, d’étendre leur prestige.

Des exactions et des massacres d’innocents sont commis par les deux camps dans différentes villes de France dont celui de Nîmes en 1567 auquel Pierre de Siorac assiste en tant que témoin passif. C’est le massacre dit de la Michelade car il eut lieu lors d’une fête locale organisée le jour de la Sant Michel, il est perpétré par des protestants qui tuent 80 à 90 catholiques et pillent des églises, cela n’est malheureusement qu’un prélude au massacre généralisé de la Saint Barthélémy qui aura lieu cinq ans plus tard et qui sera la trame de fond du troisième tome.

Tome 3 : « Paris, ma bonne ville », plongée dans l’immense cité de Paris dominée par le fanatisme religieux à l’aube de la Saint Barthélemy

Découverte de Paris et de ses habitants

Presque cinq années se sont écoulées depuis la fin du second tome et Pierre de Siorac a désormais terminé ses études à Montpellier d’où il en sort diplômé de médecine. De retour en son Périgord natal, Pierre de Siorac doit se battre en duel contre un ennemi de longue date de son père suite à un guet-apens de ce dernier et il le « dépèche » en combat régulier mais il est ensuite accusé de meurtre donc il décide de monter à la capitale pour demander la justice et le pardon du jeune roi Charles IX.

Ce troisième tome est donc l’occasion pour notre héros périgordin de découvrir l’immense ville de Paris qui est bien plus grande que les modestes cités du sud de la France qu’il a pu voir jusqu’à présent. Il nous la décrit comme insalubre, bruyante et encombrée le jour, sombre et dangereuse la nuit. Les parisiens sont dépeints comme un peuple peu docile dont même le roi a du mal à se faire obéir pour régler par exemple l’aménagement urbain qui est très anarchique et génère d’innombrables embouteillages de chevaux et de chariots. Les rues sont recouvertes d’immondices où grouille une multitude de commerçants, de colporteurs offrant leurs services en tous genres (eau, lait, nourriture, matériel de nettoyage et d’entretien) et s’interpellant les uns les autres en se lançant des invectives, les auberges sont hors de prix, finalement Paris et les parisiens n’ont pas tellement changé 😊

Enfin, Paris c’est aussi le grand fleuve de la Seine qui la traverse, les innombrables ponts majestueux qui l’enjambe, la magnifique cathédrale de Notre-Dame sur l’île de la Cité, ses innombrables églises et abbayes, la prestigieuse université de la Sorbonne, l’imposant château du Louvres, l’art du divertissement et de la décoration inimitable des parisiens, ses grandes fêtes et bals fastueux où sa mode vestimentaire est mise à l’honneur et rayonne dans tout le royaume et au-delà.

Apprentissage de l’étiquette à la cour du roi de France

Notre modeste héros périgordin découvre également les fastes de la Cour du roi de France au château du Louvres avec son étiquette qui règle les usages et où l’image que l’on renvoie aux autres est cruciale. Chacun des gestes et mots de la famille royale y sont épiés, commentés puis repris en chœurs par les courtisans et diffusés ensuite dans toute la capitale et au-delà. Il y a notamment des expressions popularisées par le roi qui sont très souvent utilisées par ses sujets aisés : « A la mode qui trotte », « En ma conscience, il en faudrait mourir » qui exprime un sentiment de perfection ou de nullité absolue.

Coligny, noble protestant français entré précédemment en guerre contre les armées royales catholiques suites aux premiers massacres de protestants, est désormais devenu ministre de la guerre et conseiller privilégié du roi Charles IX à la faveur de la période actuelle de réconciliation entre catholiques et protestants français. Coligny tente de persuader Charles IX de lancer une expédition militaire pour soutenir la révolte des Pays-Bas protestants contre l’occupation du royaume d’Espagne catholique, cela afin d’affaiblir ce puissant adversaire historique de la France qui le prend en tenailles à ses frontières sud et est.

Le roi de France Charles IX est jeune, il apparait à la fois influençable et instable, colérique, tiraillé par différentes influences contradictoires qui cherchent à le convaincre ou à le manipuler tels Coligny son ministre protestant, Catherine de Médicis sa mère ou le Duc Henri de Guise, ardent partisan catholique de la ligne dure contre les protestants et fils de François de Guise qui déclencha la première guerre de religion et fut assassiné ensuite par un protestant (cf tome 1).

Un mariage princier polémique dans un contexte de fortes tensions

Pierre de Siorac découvre avec stupeur et effroi le fanatisme catholique de la population parisienne qui est fortement influencée par les prêches virulents de leurs curés à la messe, ces derniers attisent la haine vis à vis des protestants considérés comme hérétiques et suppôts de Satan. Ce climat de tension est exacerbé par l’arrivée d’une imposante troupe de nobles huguenots venus assister au mariage de la princesse catholique Marguerite de France, sœur du roi Charles IX, et du prince protestant Henri de Navarre, qui deviendra le roi Henri IV après de nombreuses péripéties qui seront décrites plus tard. Cette cérémonie a été voulue et organisée par la reine mère Catherine de Médicis dans le but d’apaiser les tensions entre les deux camps et en dépit de la condamnation de cette future union par le pape et du désaccord des ultras catholiques menés par le Duc de Guise.

Les nobles protestants sont vêtus de noir, ils sont réputés austères et économes, soucieux de faire croitre leurs richesses au contraire de leurs homologues catholiques qui ont l’image de dilapider les leurs avec exubérance et ostentation en toilettes, en costumes colorés, en bijoux précieux et en fêtes somptueuses. Il y a là des différences assez visibles et tranchées entre huguenots et papistes sans parler des nettes divergences de conception et de pratique de la foi chrétienne comme présentées dans le premier tome. Chaque camp se méprise en dénigrant l’avarice et la pudibonderie des huguenots ou l’inconséquence, l’arrogance et la bigoterie des papistes. Ces différences de caractères et d’apparences sont assez bien représentées dans le film « La Reine Margot ».

En l’honneur du mariage princier entre Marguerite de France et Henri de Navarre, les parisiens, fidèles à leur réputation d’artistes, ont dressé des arcs en bois dans chaque quartier de la capitale qu’ils ont décorés de fleurs et de guirlandes et de magnifiques tapisseries sont suspendues aux balcons des maisons de bourgeois ou de nobles. Le mariage est célébré sur une estrade installée devant le parvis de Notre Dame, à la vue du peuple, Henri de Navarre et ses nobles protestants ayant refusé d’assister à la messe catholique à l’intérieur. Ensuite, quatre jours de festivités sont organisés à la fois pour la cour et pour le peuple avant que le drame ne survienne.

C’est tout l’avantage de ce type de récit immersif où l’on a l’impression d’être en plein cœur du Paris de cette époque et de vivre avec le peuple à travers le regard et les sentiments du narrateur. On ressent ses émotions sans être toujours aux premières loges des évènements historiques mais en ayant tout de même une bonne vision d’ensemble. Cela permet aussi de mieux se rendre compte de la situation au sein de la population, de prendre conscience du climat de haine et d’extrémisme religieux à Paris qui est exacerbé par les prêches du clergé catholique ainsi que par des calomnies mensongères, il ne suffisait plus que d’une étincelle pour mettre le feu à la poudrière.

L’étincelle qui embrase Paris

C’est l’attentat manqué sur Coligny, le 25 août 1572 dans une rue de Paris, qui est l’élément déclencheur des massacres de masse, on ne sait qui en est le réel instigateur mais la colère et la peur saisie à ce moment les deux camps qui se côtoient dans la capitale et qui sont chacun armés. Les protestants exigent naturellement que justice soit rendue dans les plus brefs délais tandis que les catholiques redoutent une vengeance de leur part alors qu’ils sont venus en nombre et en armes dans Paris.

Le roi Charles IX se rend au chevet de Coligny en lui promettant de trouver les coupables mais, finalement, il décide de l’exécuter ainsi qu’un grand nombre de gentilhommes huguenots présents à Paris, peut-être par peur des représailles de ces derniers. La foule parisienne, ultra catholique et chauffée à blanc par des prêches haineux, voyant ces exécutions, suit cet exemple morbide et se lance à son tour dans des massacres massifs de tous les protestants en ville y compris les femmes, les enfants et les personnes âgées avec l’appui de l’armée royale.

C’est la nuit de la Saint Barthélémy, un déferlement sanglant où des milliers d’innocents sont assassinés sauvagement sans distinction d’âges ni de sexes, certains opportunistes sans scrupules saisissent cette occasion pour régler des comptes avec des rivaux afin de prendre leur place ou de s’enrichir, on est parfois bien loin de considérations religieuses.

Là aussi, le récit immersif du roman est haletant, poignant, Pierre de Siorac se retrouve au chevet de Coligny pour le soigner puis cherche à fuir Paris avec sa petite troupe qui l’accompagne en assistant à des meurtres sauvages. Ils essayent dans la mesure du possible d’en éviter certains mais bien souvent ils doivent fuir pour s’échapper de cette immense souricière effroyable où le sang coule à flot et vient gonfler la Seine d’innombrables cadavres rougeoyants.

On se croirait presque dans un jeu vidéo en caméra embarquée où le héros doit échapper à de multiples embûches sur son chemin mais, malheureusement, ce n’est pas une fiction et on se demande à la fin de ce récit effroyable comment l’unité de la France pourra résister à cette tragédie. La suite au prochain tome.

Rappel de la frise chronologique de la saga

Tome 4 : « Le Prince que voilà », le roi Henri III est contesté et tiraillé de toutes parts dans un royaume qui se déchire

Calme relatif après la tempête

Pierre de Siorac, après être parvenu à échapper aux massacres de la Saint Barthélémy à Paris rentre avec sa maigre troupe dans son Périgord natal pour se mettre à l’abri au château de son père où il demeure pendant une bonne année. Des massacres de protestants ont eu lieu dans d’autres villes de France mais il reste de nombreuses troupes huguenotes qui se protègent dans leurs places fortes et résistent vaillamment aux assauts des troupes royales catholiques, notamment pendant le siège de La Rochelle. Puis, la paix revient faute de victoire décisive, ou plutôt une trêve pour reconstituer les forces de chaque côté.

Dans le même temps, Pierre de Siorac se marie en 1574 avec une jeune femme de la noblesse catholique et décide de « caler la voile », dans le langage maritime cela signifie de diminuer la voilure quand le ciel devient orageux, dans ce cas de figure il s’agit pour un protestant de prendre les apparences d’un catholique en pratiquant les rites les plus symboliques telles la messe et la confession afin de ne pas susciter de suspicions ni de risquer de subir des violences arbitraires mais, en son for intérieur, il demeure un protestant convaincu.

Les trois prochains tomes de cette saga sont mes préférés car Pierre de Siorac obtient des postes de plus en plus importants à la cour du roi de France en tant que diplomate ou espion secret et ses différentes missions nous permettent d’assister au cœur des principales intrigues et évènements du royaume qui eurent une influence considérable sur la Fortune de France lors des trois prochaines décennies. Ce récit permet également de mieux découvrir la personnalité du nouveau roi Henri III qui est peu connu.

En effet, le roi Charles IX décède de maladie en 1575, trois ans seulement après la Saint Barthélemy et c’est son frère qui lui succède, le roi Henri III. Pierre de Siorac avait fait la connaissance de ce dernier dans le troisième tome alors qu’il était encore Duc d’Anjou, c’était à la cour au château du Louvres avant les massacres de la Saint Barthélémy tandis que Pierre de Siorac cherchait la grâce du roi pour une accusation de meurtre lors d’un duel.

De retour à Paris avec sa femme, Pierre de Siorac reprend contact avec le nouveau roi Henri III et il devient l’un de ses médecins officiels. Pendant près de dix ans, Pierre de Siorac va exercer paisiblement son métier de médecin et élever ses enfants avec sa femme sans avoir d’autres rôles et peu de détails nous sont donnés sur les évènements historiques de cette période.

Les troubles reprennent en raison du nouvel ordre de succession au trône de France

Cependant, la trêve relative entre catholiques et protestants français va être à nouveau remise en cause à la mort en 1584 de François de France, le dernier frère du roi Henri III, alors que ce dernier ne parvient pas à avoir de fils avec sa femme après dix ans de mariage. D’après la loi salique, une règle de succession au trône de France issue de la dynastie des mérovingiens qui excluent les femmes de l’ordre de succession et privilégie l’aîné mâle, cela signifie que l’héritier du trône de France serait Henri de Navarre, prince protestant dont le lien de parenté direct avec Henri III dans la dynastie des Capétiens remonte au roi Saint Louis qui régna au XIIIème siècle.

Pour un rapide rappel historique, à la fin de la dynastie des Mérovingiens issue du roi franc Clovis, Hugues Capet devint roi de France en 987 et fonda une nouvelle dynastie des rois de France qui lui succédèrent : les Capétiens. Mais, à la mort du roi de France Philippe IV le Bel, ses trois fils moururent successivement sans laisser d’héritiers mâles, cette situation était un cas de figure inédit et signifiait la fin de la branche directe des capétiens.

Alors, le roi d’Angleterre, époux de la fille de Philippe IV le Bel, revendiqua la couronne de France mais les juristes du royaume français exhumèrent la fameuse loi salique des Mérovingiens afin de justifier que seuls les mâles pouvaient hériter par ordre d’ancienneté et cela afin d’éviter d’avoir un roi anglais régnant en France.

Ainsi, en suivant cette règle, le trône revenait à Philippe de Valois issue de la branche capétienne des Valois et neveu du défunt roi Philippe le Bel. Ce désaccord entraînera la guerre de Cent Ans entre la France et l’Angleterre, tous ces évènements sont très bien décrits par la saga historique Les Rois Maudits. Je vous avais dit qu’il n’était pas nécessaire de regarder Game of Thrones pour se divertir, il suffit de lire l’Histoire de France ou d’Angleterre !

Pour en revenir à la trame de notre histoire, en suivant la loi salique, à la mort du roi Henri III ce serait donc la fin de la branche des Valois et le début de celle des Bourbons avec Henri de Navarre. Afin de vous aider à mieux vous y retrouver dans la dynastie capétienne des rois de France, voici un arbre généalogique simplifié (source : extrait d’un manuel disponible sur le site internet de l’académie de Toulouse, lien internet)

Généalogie de la dynastie capétienne des rois de France

Mission délicate pour Pierre de Siorac, dilemme difficile pour Henri III

Dans ce nouveau contexte, le roi Henri III confie à Pierre de Siorac une mission secrète sous le couvert de sa fonction de médecin à la cour pour accompagner une délégation royale officielle qui va à la rencontre de Henri de Navarre afin de lui demander de se convertir à la foi catholique en échange d’être reconnu officiellement par Henri III comme son héritier légitime. Pierre de Siorac a l’avantage d’avoir des contacts dans le camp protestant de par son père et d’être moins connu que l’émissaire officiel de Henri III, il peut donc plus facilement avoir des entrevues secrètes avec des échanges plus fournis à rapporter au roi sans éveiller les soupçons car il y a des espions partout et les discussions officielles ne sont bien souvent qu’une façade.

Le dilemme est difficile pour Henri III : respecter la règle de succession historique du trône de France quitte à avoir un roi protestant dans un royaume majoritairement catholique ou bien renier pour la première fois l’ordre de succession afin de garantir un souverain catholique à la France mais avec le risque de créer une forte instabilité du régime car, si cette règle n’est plus respectée, alors de multiples prétendants pourraient voir le jour en s’appuyant sur différents prétextes et ils se lanceraient probablement dans d’interminables et redoutables guerres de succession. C’est pourquoi la conversion de Henri de Navarre faciliterait cette succession mais ce dernier y a été contraint plusieurs fois sous la menace, dont la dernière pendant les massacres de la Saint Barthélémy alors qu’il était retenu otage à la cour du roi et il abjura aussitôt qu’il put fuir la capitale et retrouver ses troupes donc il est peu enclin à le faire.

Apparition de la Ligue catholique

Avant d’être roi de France, Henri III, alors Duc d’Anjou, était partisan de la répression des protestants et, après la Saint Barthélémy, il avait prit la tête de l’armée royale pour faire le siège de La Rochelle qui était alors une grande place forte protestante. Les assiégés résistèrent vaillamment pendant de longs mois face aux nombreuses attaques du camp royal en partie grâce au ravitaillement des anglais par la mer et le siège fut finalement levé.

A présent qu’il est roi de France, Henri III a pu constater l’inefficacité et les ravages de la lutte armée contre les protestants et il est désormais bien plus modéré, voulant éviter le plus possible les effusions de sang et en étant prêt à des concessions.

Henri III aspire à la paix du royaume mais il est dans le même temps pressé par le nouveau parti de la Ligue catholique sous l’égide du Duc de Guise qui a été créé par les forces catholiques souhaitant la répression des protestants. Ce mouvement a le soutien d’une grande partie de la noblesse et du clergé français ainsi que de la propre mère du roi, Catherine de Médicis. Une nouvelle guerre de religion se déclenche à partir de 1585 entre protestants et catholiques, c’est la huitième depuis 1562 et la dernière de cette ampleur, elle durera treize ans et se transformera en guerre entre royalistes que l’on pourrait « loyalistes » (catholiques et protestants) contre les ligueux catholiques.

La Ligue est devenue quasiment un Etat dans l’Etat en occupant des villes françaises stratégiques et en s’alliant avec le puissant royaume catholique d’Espagne de Philippe II qui poursuit une lutte acharnée contre les huguenots en révolte aux Pays Bas occupés par l’Espagne tout en projetant d’envahir le royaume d’Angleterre qui a rebasculé dans le protestantisme avec l’accession au trône de Élisabeth 1ère en 1558 après la mort de la reine Marie Tudor, l’ancienne épouse de Philippe II.

Petite parenthèse sur l’Histoire d’Angleterre

La complexité de l’Histoire du royaume d’Angleterre n’a rien à envier avec celle de la France à cette époque : Marie Tudor est la fille aînée du roi Henri VIII (surnommé Barbe Bleue) et de sa première femme, Catherine d’Aragon, catholique et espagnole, dont le roi d’Angleterre se sépare en déclenchant un conflit ouvert avec le pape qui refuse d’annuler le mariage et qui mènera à la sécession de l’Eglise d’Angleterre avec l’Eglise catholique en créant l’Eglise anglicane qui est une forme de protestantisme (je vous conseille la série « Les Tudors » qui retrace très bien l’histoire tumultueuse de ce fameux roi).

Marie est catholique et tente de rétablir par la force le catholicisme en Angleterre lorsqu’elle devient reine, ces persécutions lui vaudront le surnom de « Bloody Mary ». A sa mort en 1558, sa demi-sœur Elisabeth lui succède et rétablit le protestantisme comme religion d’Etat, Elisabeth est la fille de Henri VIII et de sa deuxième femme qui sera exécutée sur ordre de ce dernier.

Intimité du roi Henri III et usages à la cour

Dans ce tome, nous sommes témoins à travers le personnage de Pierre de Siorac de nombreux moments d’intimité du roi Henri III où il apparait hésitant et meurtrit par les fréquentes attaques de toutes parts dont il fait l’objet.

Pour l’égayer, Henri III est très souvent accompagné de son bouffon dénommé Chicot qui n’a quasiment aucune limite dans ses saillies sur n’importe quels personnages du royaume aussi important soit-il. Chicot se tient informé des intrigues de la cour et divertit le roi qui connait bien des désagréments et des déconvenues, c’est intéressant de découvrir ce type de personnage original avec un rôle si atypique.

L’art de discourir à la cour est plaisant, les dialogues sont fluides, les mots bien choisis, les phrases bien formulées et les idées clairement énoncées, on aimerait pouvoir s’exprimer comme cela à l’oral sans hésitations, sans chercher ses mots ou corriger ses propos. Tout s’entend intelligiblement, c’est tellement riche en vocabulaire et en expressions qu’il faut parfois relire deux fois pour bien comprendre le sens d’une tournure de phrase ou le choix de certains mots. Là encore, c’est tout à l’honneur de son auteur Robert Merle d’être capable de retranscrire cet art avec autant de talent.

C’est l’époque où le français devient langue officielle du royaume et remplace peu à peu le latin grâce notamment à de grands écrivains français tels Rabelais ou Montaigne qui contribuèrent à enrichir, structurer et populariser la langue française dont les rois de France mettent un point d’honneur à maitriser toutes les subtilités et finesses et sont suivis par leurs courtisans à la cour.

On constate également l’influence de la culture italienne avec ses jeux de mots (« giochi di parole ») dont raffole la Cour pour égayer les conversations. Les cultures européennes se mêlent et s’enrichissent mutuellement, notamment dans les élites, c’est déjà le début du rêve d’unité européenne du philosophe humaniste Erasme, décédé en 1536.

On pratique également l’art de faire la cour aux dames et, pour celles-ci, de faire languir leurs prétendants pour tester leur réel attachement, d’exiger des preuves d’amour, les révérences sont de mise ainsi que la galanterie.

C’est une époque à la fois rude où les armes sont portées quasiment constamment et où les combats sanglants sont fréquents mais il y a également du raffinement et de la finesse dans les conversations, dans les parures, dans les gestes. La délicatesse est tout autant mise à l’honneur que le courage et il peut arriver parfois que des hommes d’importance laissent couler des larmes d’affection publiquement pour montrer leur attachement à des êtres chers, ce n’est pas qu’une sombre période d’obscurité et de violence.

Découverte de la capitale anglaise et de ses habitants dans un contexte géopolitique européen tendu

Henri III confie une nouvelle mission secrète à Pierre de Siorac pour se rendre à Londres, encore une fois en accompagnant une délégation officielle française qui a pour objet de demander à la reine Elisabeth la grâce de Marie Stuart, jugée coupable de tentative d’assassinat sur la reine d’Angleterre et condamnée à la peine de mort.

Marie Stuart est la cousine du Duc de Guise et elle est de confession catholique donc elle a le soutien de la Ligue en France. Elle fut brièvement la jeune épouse du défunt roi de France François II qui mourra précocement de maladie puis elle devint reine d’Ecosse. Marie Stuart peut prétendre à la succession de la reine Elisabeth qui n’a ni mari ni enfant car elle est la petite fille de la sœur du précédent roi anglais Henri VIII mais elle sera finalement exécutée en 1587 pour complot contre sa souveraine. Toutefois, son fils Jacques succèdera à la reine Elisabeth, concluant ainsi la fin de la dynastie des Tudors et le début de la dynastie des Stuart.

La mission secrète de notre James Bond français confiée par le roi de France est de porter un message secret à la reine d’Angleterre pour lui demander de lancer des attaques sur la Lorraine, le fief des Guise en France, en utilisant des mercenaires allemands protestants afin d’obliger la Ligue catholique menée par le Duc de Guise de se détourner des troupes de Henri de Navarre au sud. C’est du pur machiavélisme (auteur italien dont les œuvres sont récentes) de la part du roi de France qui n’hésite pas à employer la menace de combattants étrangers sur son propre royaume afin de régler des problèmes internes.

La ville de Londres est décrite comme plus austère que Paris mais sa population semble plus soudée et disciplinée autour de son monarque avec un grand respect de la loi et de ses représentants alors que de grandes menaces planent sur son royaume, à savoir le projet d’invasion de l’Angleterre par la flotte espagnole de Philippe II ainsi que des tentatives d’assassinats sur la reine Elisabeth par le clan catholique (plusieurs sont déjoués par l’implacable ministre anglais Walsingham).

Pierre de Siorac fait l’expérience également à la cour de la reine d’Angleterre du célèbre flegme britannique parmi les courtisans et représentants de la souveraine qui demeurent calmes et déterminés malgré les menaces. Toutefois, derrière leur froideur apparente se cache souvent des êtres facétieux qui ont le goût également des jeux de mots et des plaisanteries ironiques poussant à l’extrême des situations absurdes et burlesques.

La pression s’accentue sur le roi de France qui doit quitter sa capitale

La reine d’Angleterre accepte la demande de Henri III et finance donc une armée de mercenaires allemands pour semer le chaos sur les terres Lorraine mais le Duc de Guise parvient à les repousser et il en gagne davantage de prestige auprès de la population et dans le camp de la Ligue tandis que Henri III combat mollement Henri de Navarre pour donner le change.

La population et les élites de Paris, entièrement acquises à la cause de la Ligue deviennent de plus en plus suspicieux et critiques envers le roi de France tandis que le pouvoir du Duc de Guise grandit de jour en jour. Ce dernier pousse pour que l’oncle de Henri de Navarre, cardinal catholique, soit désigné comme le successeur de Henri III en contradiction avec la loi salique.

Ce délitement de l’autorité royale se traduit par la « Journée des barricades » en mai 1588 qui se déroule, sans surprise, à Paris et de plus au mois de mai 🙂 C’est une des premières fois dans l’Histoire que des barricades sont installées en milieu urbain pour empêcher la progression d’une force armée : cocorico ! Cet acte de résistance populaire a été préparé et organisé en sous-main par la Ligue catholique et intervient en réaction à l’arrivée de la Garde Suisse qui entre dans Paris sur ordre du roi afin de réaffirmer son pouvoir.

Des échauffourées ont lieu avec la population parisienne au passage des troupes suisses dans les rues étroites et encombrées de la capitale, des coups de feu sont tirés de part et d’autres et de nombreuses barricades sont soudainement élevées pour bloquer le passage aux gardes suisses qui se retrouvent rapidement isolés et doivent se replier à l’abri.

Henri III refuse de mener une controffensive féroce contre sa population et il décide quitter la capitale de son propre royaume par surprise avec le reste de ses troupes loyales, laissant Paris aux mains de la Ligue et de son meneur le duc de Guise. Le roi s’installe à Blois en recréant un semblant de cour et il continue de lutter courageusement pour la paix et l’unité du pays en refusant de céder aux injonctions de la Ligue tout en ménageant son héritier Henri de Navarre.

Après diverses tentatives de conciliation, Henri III se résout à une terrible décision

Toutefois, la pression s’accentue sur lui car les puissantes forces de la Ligue menées par le Duc de Guise chassent ses fidèles sujets de villes stratégiques et elles ont le soutien financier et matériel du roi d’Espagne Philippe II qui lance dans le même temps son Invincible Armada contre le royaume d’Angleterre. Ainsi, les destins de la France et de l’Angleterre sont à ce moment de l’Histoire étroitement liés avec le risque de basculer dans le giron espagnol.

Mais la flotte anglaise lance des raids astucieux en août 1588 avec des petits bateaux très maniables et des brûlots qui sèment une grande confusion dans la flotte espagnole amarrée à proximité de ses côtes et obligent les espagnols à quitter leur mouillage de manière désordonnée. Puis, une grande tempête endommage fortement les bateaux espagnols les obligeant à retourner en Espagne, c’en est fini de l’Invicible Armada de Philippe II et de ses rêves d’invasion de l’Angleterre.

Ainsi, l’étau se desserre également sur Henri III, il est temps d’agir. Le monarque tente de reprendre la main en lançant des Etats Généraux à Blois à partir d’octobre 1588 mais l’influence de la Ligue est trop forte et elle lui impose ses choix. Le Duc de Guise demande, exige même à mots couverts, d’être nommé aux plus hautes fonctions de l’Etat pour accroitre davantage son pouvoir et s’assurer une certaine légitimité.

Alors, le roi de France se résout finalement à ordonner l’assassinat par ses gardes du Duc de Guise le 23 décembre 1588 à Blois lors de la fin des Etats Généraux et d’autres meneurs de la Ligue sont emprisonnés. A trop vouloir faire de concessions en refusant la manière forte pour éviter de faire couler du sang, Henri III en vient à ces dernières extrémités.

Rappel chronologique de la saga

Tome 5 : « La Violente Amour », l’assassinat du roi Henri III et la conquête du pouvoir par Henri IV

Nouveaux troubles au royaume de France, les cartes sont redistribuées

Après l’assassinat du Duc de Guise et l’emprisonnement de certains rivaux, Henri III a repris la main et possède de plus larges marges de manœuvre dans son royaume mais les troupes et les villes acquises à la cause de la Ligue demeurent encore nombreuses et puissantes tout en étant désormais très exaltées par le meurtre de leur héros martyr.

Henri III fait alors la jonction de ses armées avec celle de Henri de Navarre pour combattre la Ligue, c’est une nouvelle guerre civile entre français qui commence mais, cette fois-ci, avec une armée coalisée de catholiques fidèles au roi et de protestants face à la Ligue catholique soutenue par l’Espagne.

La coalition des Henri parvient à reprendre progressivement des places fortes stratégiques qui permettent d’encercler Paris pour y mettre le siège. C’est à ce moment qu’un moine fanatisé par la Ligue et les religieux de la capitale, Jacques Clément, est envoyé dans le but d’assassiné Henri III qui est vu comme un traître à sa religion et à son pays. Jacques Clément parvient à déjouer les soupçons en raison de sa fonction de moine modeste et les comploteurs de la Ligue à Paris ont fait en sorte qu’il puisse s’entretenir avec des prisonniers importants favorables à Henri III afin qu’il puisse demander une conversation privée avec le roi pour lui transmettre des messages secrets. Le roi accepte sa requête et Jacques Clément s’approche à son oreille sous les yeux des gardes restés à proximité quand, soudain, le moine sort un couteau de sa manche et poignarde Henri III à l’estomac avant de se faire massacrer par les gardes royaux furieux.

Henri III mourra quelques heures plus tard, le 2 août 1589, à Saint Cloud, il est le dernier roi de la branche des Valois et le premier roi de la dynastie des capétiens assassiné mais il ne sera malheureusement pas le dernier. Le roi de France agonisant a tout juste le temps de réunir autour de lui la noblesse qui lui est restée fidèle pour leur demander solennellement de prêter allégeance à leur futur roi Henri IV qui est également présent. Les nobles catholiques font un serment de fidélité à leur prochain souverain bien qu’il soit protestant mais certains renieront leur engagement quelques temps plus tard. Ce sera à Henri IV de conquérir son royaume et son peuple par la force, la ruse et la diplomatie.

L’expression « violente amour » serait de lui, elle traduit son sentiment ambigu de souverain épris de son peuple qui doit néanmoins en combattre une partie de celui-ci pour reprendre son royaume et assoir sa légitimité. Henri IV n’est pas reconnu comme roi par la Ligue catholique car il est protestant, il a néanmoins une partie de la noblesse et donc de l’armée catholique avec lui par fidélité envers la légalité et la tradition de l’ordre de succession du roi de France.

Le dilemme et la lutte de Henri IV pour reconquérir son royaume et son peuple

Henri IV, premier roi de la branche des Bourbons, a un tempérament différent de Henri III, il n’a pas été élevé à la cour du roi de France bien qu’il y ait vécu un temps après son mariage avec Marguerite mais dans des circonstances très difficiles. Henri IV mène ses troupes et participe aux batailles depuis tout jeune, il est habillé modestement et souvent en armures, adepte du franc parler en allant à l’essentiel sans fioritures ni grandes tirades, proche du peuple et familier avec ses courtisans sans cérémonial.

Alors qu’il succède à Henri III, il hésite à se convertir au catholicisme comme lui enjoignent les nobles catholiques qui le soutiennent mais cette décision risque très certainement de lui mettre à dos les puissants nobles protestants qui lui sont fidèles depuis toujours et puis, ce serait encore une énième fois qu’il changerait de religion. Henri IV décide donc de remettre à plus tard sa décision mais il se montre tolérant envers les catholiques et magnanime envers ses anciens adversaires lorsqu’ils sont défaits afin de s’assurer de leur soutien.

En mars 1590 a lieu la bataille d’Ivry en Normandie entre Henri IV et la Ligue, l’issue des combats est incertaine et c’est là que nait la légende où le roi Henri IV aurait harangué ses troupes en leur disant de se rallier à son « panache blanc ». Le blanc est la couleur de l’écharpe et des grandes plumes posées sur le chapeau que porte Henri IV pour le distinguer ainsi que ses partisans, il les enjoint donc à le suivre jusqu’au bout pour emporter la victoire.

Ivry fut une bataille violente et indécise où la Ligue chercha à briser le siège de Paris, ses forces étaient plus nombreuses mais la bravoure du roi de France et de ses armées prirent finalement le dessus. Pierre de Siorac participe à cette bataille mais il en voit seulement une partie qui est très confuse, une immense charge de cavalerie où tout s’entrechoque, il en sort indemne mais complètement hagard. Au milieu de ce charnier, il ne sait plus où il est, où sont ses compagnons d’armes mais il est en vie et il apprend finalement avec soulagement la victoire de son camp.

La conversion du roi et la conquête de Paris

Désormais, l’objectif principal de Henri IV est de conquérir la capitale pour assoir sa légitimité dans le royaume de France. Paris, la rebelle de toujours, est cette fois-ci dans le camp des ultras catholiques, ironie de l’Histoire alors que quelques siècles plus tard la capitale se soulèvera pour les idéaux de la Révolution et en opposition à cette même Eglise catholique mais toujours contre son souverain, cela reste une constante.

Pierre de Siorac est utilisé à nouveau comme espion pour le compte du roi et il parvient à s’installer dans Paris en tant que marchand. Il nous décrit le siège de plusieurs mois de l’immense cité et ses conséquences effroyables pour la population en raison d’une terrible famine qui sévit et emporte de nombreux habitants après d’affreuses privations, tous les animaux sont mangés et il y a même des actes de nécrophagies.

Il est estimé que près de trente mille habitants moururent de faim pendant ce siège sur un total de trois cents mille mais la Ligue s’obstine néanmoins à résister contre les troupes royales et traque les « politiques », catholiques modérés qui sont enclins à un accord avec Henri IV pour retrouver la paix et la prospérité. La foule parisienne est quant à elle continuellement haranguée par les curés pendant les sermons de la messe.

Finalement, après quatre années de lutte armée depuis son accession au trône, le roi Henri IV décide de se convertir une nouvelle fois au catholicisme en juillet 1593 dans la basilique Saint-Denis car il prend conscience qu’il ne peut gouverner le royaume de France sans embrasser la foi de la majorité de ses sujets et une grande partie de sa noblesse protestante s’y résout également.

Ce fait majeur ouvre une brèche dans le camp opposé et une part significative des nobles et du clergé de la Ligue commence progressivement à le reconnaitre comme leur roi légitime malgré les précédents propos véhéments qu’ils ont tenu à son encontre. Le parti du roi devient de plus en plus fort et les opportunistes basculent de son côté, entrainant avec eux les plus engagés et isolant les plus enragés.

Après une levée temporaire du siège de Paris par les armées royales afin de combattre une armée de la Ligue venu secourir les assiégés, le blocus reprend mais des négociations secrètes ont lieu avec certains membres influents de la garde parisienne qui sentent le vent tourner en leur défaveur et qui acceptent finalement, en échange de récompenses, d’ouvrir les portes de la ville en pleine nuit.

Ainsi, les troupes royales investissent Paris en mars 1594 dans le calme et sans effusions de sang alors que la population parisienne est à bout de force. Henri IV est désormais maître de Paris et il s’installe au palais du Louvres qui n’avait plus hébergé de roi de France depuis quasiment six années après l’épisode de la « Journée des barricades » (cf tome 4).

La clémence pour pacifier et reconstruire le pays

Henri IV pardonne aux séditieux de la Ligue à Paris malgré leur longue et farouche opposition armée mais il préfère opter pour la clémence afin de reconstruire et réunifier le pays dans la paix après une longue succession de guerres fratricides. Il n’y a donc pas de grands procès organisés pour juger tous les coupables, seuls les plus zélés seront sanctionnés en étant bannis du royaume.

On peut faire le parallèle avec la situation de la France à la Libération en 1944 et du sort des nombreux français qui avaient collaboré avec l’envahisseur de manière plus ou moins engagée, il fallait aussi reconstruire et réunifier le pays qui aurait pu sombrer dans une guerre civile ou passer sous le giron d’une puissance étrangère, c’est un dilemme difficile entre la justice et la paix.

Rappel chronologique de la saga

Tome 6 : « La Pique du jour », reconquête et consolidation du royaume de France par Henri IV

L’étau se desserre autour de Paris

Ce tome commence par une nouvelle mission secrète confiée par le roi de France fraîchement installé à Paris pour son fidèle serviteur Pierre de Siorac dont l’objectif est de s’introduire dans la ville de Reims qui est aux mains des ligueux afin d’obtenir leur ralliement comme c’est le cas de plus en plus de bon villes aux mains de la Ligue en France suite aux nombreux succès de Henri IV et à sa conversion au catholicisme.

Notre héros périgordin parvient à libérer la ville de ses éléments les plus radicaux et à faire évacuer une garnison espagnole tout en nouant des contacts avec les principaux représentants de la ville ce qui permet de commencer les négociations pour le ralliement de Reims qui nécessiteront du temps.

Sur le chemin du retour, Pierre de Siorac rejoint le roi supervisant avec son armée le siège de la ville fortifiée de Laon qui constitue un verrou donnant accès à la région de Champagne. Si la ville est prise, les pourparlers avec Reims et les autres cités autour seront plus aisés. C’est également une place stratégique pour couper la retraite des armées espagnoles qui occupent la Picardie et qui se ravitaillent depuis leurs terres des Flandres.

Les troupes espagnoles tentent d’attaquer l’armée royale pour briser le siège mais elles échouent avec de lourdes pertes et se retirent, Laon se rendra donc à Henri IV et bientôt la Champagne se ralliera à lui moyennant pécunes et promotions. On est bien loin des considérations religieuses ou politiques de la part des principaux responsables, l’argent et le pouvoir sont souvent les objectifs premiers. Désormais, il reste à Henri IV de libérer les régions picarde et bretonne qui demeurent aux mains des ligueux et des espagnols afin de réunir entièrement le royaume de France.

L’influence des religieux en France

De retour à Paris, se tient le procès de l’ordre des jésuites qui est accusé par les universitaires et les curés de Paris de leur faire une concurrence déloyale en proposant un enseignement gratuit avec des méthodes réputées moins coercitives et en captant les confessions lucratives des nobles en raison de leur indulgence et de leur compréhension.

L’ordre des jésuites est tout récent, il a été fondé au milieu de ce siècle alors que l’Eglise catholique cherche à contrer l’expansion de la Réforme protestante. C’est une congrégation d’origine espagnole donc elle suscite la méfiance en France qui est son grand rival. Ses membres sont très disciplinés et très instruits, ils sont autonomes vis à vis des évêques locaux et ils gagnent en influence dans la population au travers des enseignements qu’ils proposent.

Certains les accusent d’inciter ou voir même de participer à des tentatives d’assassinats contre des chefs protestants ou catholiques modérés comme par exemples le chef de la révolte protestante aux Pays-Bas, le Prince Guillaume d’Orange, qui fut assassiné en 1584 par un catholique, plusieurs tentatives déjouées contre la reine anglaise Élisabeth ou bien Henri III qui mourra sous les coups d’un moine capucin en 1589.

Alors que le procès des jésuites était sur le point d’être ajourné, une tentative d’assassinat contre le roi Henri IV échoue le 27 décembre 1594. Le monarque n’est que légèrement blessé par un jeune homme dont on découvre, après enquête, qu’il a été instruit au collège jésuite de Clermont à Paris (actuel lycée Louis le Grand), on soupçonne donc l’assaillant d’avoir été influencé par les jésuites pour commettre cet acte.

Ainsi, le collège des jésuites est perquisitionné et on y trouve des documents avec des propos compromettants vouant aux enfers l’ancien roi Henri III ainsi que l’actuel roi Henri IV, ce qui est un crime de lèse-majesté. Par conséquent, le jésuite à qui appartenait ces documents est pendu et l’ordre des jésuites est expulsé de France.

Ce conflit ouvert entre un puissant ordre religieux et le roi de France lorsque l’influence du spirituel menace le pouvoir royal n’est pas le premier. En effet, comme raconté dans la saga des Rois Maudits, Philippe le Bel interdit l’ordre des Templiers en France qui a accumulé une grande richesse et une influence considérable avec les croisades, son chef est exécuté et les trésors sont confisqués, c’est aussi un moyen pour le monarque français de renflouer ses caisses.

Mission à Rome

Ensuite, Pierre de Siorac est envoyé en mission à Rome pour aider à convaincre le pape de lever l’excommunication du roi Henri IV qui est pour le moment maintenue bien que le monarque se soit convertit au catholicisme et que la majorité du clergé français se soit rallié à lui.

Cependant, le pape est contraint par la puissance du roi d’Espagne Philippe II qui est en conflit ouvert avec Henri IV et refuse catégoriquement son absolution en faisant pression sur le Vatican.

L’Italie n’existe pas à cette époque, elle est divisée en multiples duchés et royaumes et Rome est le théâtre d’une lutte d’influence entre les puissances étrangères catholiques telles la France et l’Espagne ainsi que le Vatican, Florence et Venice. Ces deux dernières vont aider la délégation française dans sa démarche afin de contrer la domination espagnole et, finalement, le Vatican accordera l’absolution du roi Henri IV le 17 septembre 1595 après de multiples tractations car il y a un risque de schisme de l’église gallicane française comme cela a été le cas dans le passé avec l’église anglicane d’Angleterre.

A noter qu’il y a des passages un peu longs dans ce récit à Rome avec moins de péripéties et d’évènements intéressants par rapport aux deux tomes précédents, le rythme est plus lent, c’est moins palpitant.

Henri IV promulgue l’édit de Nantes après avoir réunifié son royaume

De retour en France, Paris est menacée en raison de la prise d’Amiens par les espagnols avec la complicité de certains irréductibles ligueux. Henri IV doit donc lever une nouvelle armée avec toute sa noblesse pour en faire le siège. Cette fois-ci, Mayenne, l’ancien chef militaire de la Ligue, est dans le camp royal après le pardon de son roi qui l’intègre à son commandement militaire en raison de ses grandes qualités de stratège. Ainsi, après s’être livrés des batailles meurtrières avec rage pendant une dizaine d’années les anciens ennemis combattent désormais côte à côte.

Une armée espagnole envoyée pour secourir les assiégés est mise en déroute par les troupes royales françaises et la ville d’Amiens se rend en 1597. Désormais, Henri IV peut diriger ses troupes vers la Bretagne qui demeure la dernière région française encore aux mains de la Ligue et de l’Espagne. La Bretagne acceptera finalement de se rendre à son roi en échange de grandes quantités d’espèces sonnantes et trébuchantes afin d’éviter de nouvelles batailles meurtrières.

A présent que son royaume est réunifié et que la paix civile est rétablie après huit guerres de religions étalées sur seulement quatre décennies, Henri IV décide de promulguer l’Edit de Nantes le 13 avril 1598 afin d’instaurer la liberté de culte en France (sauf dans certaines villes à grande majorité catholique ou protestante) et d’offrir plusieurs places fortes pour les protestants.

Cependant, de nouvelles contestations intérieures montent dans les rangs catholiques suite à cette décision et les parlements des grandes villes rechignent à signer cet édit, il faut que le roi intervienne personnellement pour les forcer à le faire et cela prendra plusieurs années.

Dernière mission en Espagne, rencontre avec le monarque le plus puissant d’Europe

Après la promulgation de l’Edit de Nantes, Pierre de Siorac est envoyé en Espagne pour une nouvelle mission qui est sa dernière et, cette fois-ci, il s’agit d’une ambassade officielle et non plus de tractations secrètes. Henri IV lui commande de traiter en son nom avec le roi d’Espagne Philippe II à propos de différents frontaliers alors que les deux royaumes rivaux ont désormais fait la paix.

Le roi d’Espagne est très affaibli après quarante années de règne et il mourra quelques mois plus tard, le 13 septembre 1598, au palais de l’Escurial situé à une quarantaine de kilomètres de Madrid. C’est un immense monument édifié par Philippe II lui-même pour en faire une nécropole des rois d’Espagne avec de nombreuses reliques de Saints catholiques.

Philippe II fut roi d’Espagne de 1555 à 1598, monarque le plus puissant d’Europe à cette époque grâce aux richesses de ses colonies d’Amérique et à la puissance de ses armées. Sous son règne, il obtint une grande victoire navale à Lépante en 1571 avec le soutien de la marine italienne contre les ottomans, il lutta également contre l’expansion du protestantisme en Europe mais avec moins de succès. Contre la révolte des « gueux » protestants aux Pays-Bas qui était alors une possession espagnole et qui furent finalement divisés en 1581 avec au nord les Provinces Unies protestantes (la future Hollande) et au sud les provinces catholiques (la future Belgique), il échoua également dans sa tentative d’invasion de l’Angleterre en 1588 et son large soutien militaire et financier de la Ligue catholique en France fut insuffisant pour renverser le pouvoir royal.

Suite à cette dernière mission, notre fidèle héros périgordin Pierre de Siorac retourne à Paris et commence l’écriture de ses Mémoires, la paix dans son royaume étant retrouvée. Il en termine la rédaction le 4 mai 1610, dix jours avant l’assassinat du roi Henri IV en pleine rue de Paris. C’est le début de nouveaux troubles qui seront racontés dans une deuxième partie de la saga Fortune de France par le fils de Pierre de Siorac mais ceci est une autre histoire !

Rappel chronologique de la saga

Ce que je retiens de ce récit Historique

Il est désormais temps de conclure en vous partageant les principaux enseignements que je tire de ce récit historique en complétant avec des recherches annexes pour l’écriture de cet article.

La Monarchie française ne fut pas aussi stable et absolue que je le pensais

Contrairement à l’image que j’en avais, la Monarchie française n’a pas été un long fleuve tranquille, le régime royal ne signifiait pas souvent le pouvoir absolu telle l’image que l’on a règne de Louis XIV. Les rois de France étaient souvent en proie à de multiples tensions et luttes de pouvoir avec des vassaux turbulents et ambitieux, y compris même au sein de leur propre famille sans compter les menaces extérieures et la puissance du clergé. Le peuple avait bien moins de droits et de libertés qu’avant mais il y avait quand même une certaine inertie et une résistance passive à l’application de certaines lois, la bourgeoisie commençait également à prendre de l’importance avec l’émergence de riches villes quasi autonomes.

Les rois ne sont pas non plus systématiquement des tyrans sanguinaires, ils peuvent avoir aussi des sentiments humains et avoir la volonté de préserver la paix et la vie de leurs sujets, ils sont parfois tiraillés entre des courants contraires qui cherchent à les manipuler, à forcer des décisions, ce n’est pas une place aisée surtout pour un monarque qui souhaite gouverner pour le bien commun de l’ensemble du pays et pas d’un seul clan ou d’un parti.

L’homogénéité religieuse favorise la stabilité de chaque Etat non laïc

Au vu de ces nombreux conflits religieux qui ont ensanglanté la France et de l’absence d’un consensus stable malgré différentes tentatives de conciliation, il apparait difficile, voire même impossible d’avoir deux religions importantes dans un seul Etat à cette époque où les croyants étaient fervents et très pratiquants à moins que l’Etat soit neutre, c’est-à-dire laïc. C’est désormais le cas en France depuis plus d’un siècle et sur fond de baisse importante de la pratique religieuse donc la question ne se pose plus mais elle pourrait s’appliquer à d’autres domaines telles la culture et le mode de vie.

Ainsi, Henri IV a dû se résoudre à se convertir au catholicisme qui était la religion majoritaire de ses sujets afin d’être accepté comme leur roi légitime et de pacifier le pays. Il a ensuite promulgué l’Edit de Nantes instaurant la liberté de culte et donnant davantage de droits aux protestants mais cela n’empêchera pas de nouveaux conflits internes après lui et cette loi sera finalement révoquée par Louis XIV.

La France n’est pas une exception à cette prédominance d’une religion majoritaire dans un seul pays à cette époque : l’Angleterre est protestante tout comme la Suisse, l’Espagne est catholique tout comme l’Italie et le Portugal, les Pays-Bas seront divisés en deux états, la Hollande protestante et la future Belgique catholique. Il y a une différence en Allemagne avec le Saint Empire mais parce qu’il était constitué d’Etats très autonomes qui pouvaient choisir leur religion.

Cette situation s’est également posée lors de la fin de l’empire des Indes britanniques qui a été scindé en deux sur la base de la religion : le Pakistan pour les musulmans et l’Inde pour les hindous (avec la présence d’une minorité musulmane).

La force n’est pas la seule solution, même à cette époque réputée brutale

Parfois, les négociations de salons peuvent obtenir des résultats aussi importants que les batailles en limitant les coûts humains et financiers, il faut donc y rester ouvert sans se faire marcher dessus ou abusé comme cela a été visiblement le cas du roi Henri III avec la Ligue. L’argent et les promotions peuvent aider également à convaincre les belliqueux.

De même, la ruse ou parfois malheureusement la traitrise, comme les assassinats, peuvent aussi être utilisées mais avec des résultats souvent instables et parfois même inverses du but recherché en raison des réactions qu’ils entrainent. Ainsi, l’assassinat de Henri de Guise par le roi de France ne fit que renforcer l’exaltation de la Ligue catholique qui tenait là un martyr idéal pour haranguer les foules et résister pendant plusieurs années au pouvoir royal à Paris tout comme de nombreuses autres villes françaises. De même avec l’assassinat de Henri III par la Ligue qui entraina l’accession au trône de leur plus farouche ennemi, Henri IV, chef du parti protestant et qui su les vaincre par la force et la diplomatie.

Pardonner pour pacifier et reconstruire le pays parfois au détriment de la justice

Alors que la victoire est obtenue après avoir combattu fermement ses adversaires, il est parfois nécessaire de conclure la paix en partie au détriment de la justice afin d’éviter de nouveaux conflits, notamment après une guerre civile. Ainsi, les acteurs les plus impliqués et les plus coupables doivent être jugés et condamnés sévèrement mais cela peut être avisé de faire preuve d’une certaine clémence pour les subalternes afin d’aller de l’avant et reconstruire le pays.

La période d’après guerres des religions sous Henri IV après sa victoire contre la Ligue peut se comparer en ce sens à la situation de la France après la Révolution ou à la Libération où il a bien fallu réconcilier les anciens ennemis (républicains et royalistes, résistants, collabos et passifs) ou du moins les faire cohabiter pacifiquement.

Garder espoir en l’avenir et tenir bon malgré l’adversité

Enfin, pour terminer sur une note positive, je tire également de ce récit et notamment du parcours du roi Henri IV qu’il ne faut pas désespérer de situations qui semblent sans issues favorables ou trop difficiles à surmonter.

Henri de Navarre a été le témoin du massacre de ses camarades et coreligionnaires à la Saint Barthélémy où il a été forcé de se convertir au catholicisme et où il fut gardé captif à la cour du roi puis il parvint à s’enfuir, à récupérer ses terres pour reprendre le combat avec ses troupes contre un ennemi bien plus puissant.

Lorsqu’il accéda au trône de France en tant que Henri IV après de multiples circonstances, il fut contesté par la Ligue qui tenait les principales villes du pays avec le soutien du puissant royaume d’Espagne. De nombreuses fois il dut s’impliquer personnellement dans des batailles sanglantes à l’issue incertaine et il luta sans relâche pour se faire accepter de gré ou de force d’une grande partie de ses sujets (noblesse, clergé et tiers-état) qui le conspuait en le traitant d’hérétique. Henri IV parvint progressivement à reconquérir son royaume et son peuple grâce à ses victoires militaires tout en faisant certaines concessions (conversion au catholicisme, pardon et réhabilitation de ses anciens ennemis). 

Donc, avec de la persévérance, de la combativité, de l’intelligence et de la patience, on peut améliorer la situation et se rapprocher de ses objectifs puis, en atteignant un certain seuil, cela peut même enclencher un cercle vertueux où les pragmatiques, clairvoyants ou opportunistes vous rejoignent progressivement en faisant pencher la balance de votre côté. Ce mécanisme fonctionne également dans l’autre sens, si vous échouez et que vous perdez du pouvoir on vous respecte moins et vous risquez de perdre du soutien, à méditer.

Si vous êtes parvenus à lire cet article en entier je vous félicite et vous en remercie grandement! N’hésitez pas à laisser un avis en commentaire 😊

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Hugues B.