Introduction

Quelques mois après le décès de ma tendre et chère grand-mère maternelle, nous étions avec mon oncle et mes tantes en train de vider avec émotion la maison familiale et chacun d’entre nous réfléchissait aux objets qu’il souhaitait et pouvait conserver. Etant logé dans un appartement de banlieue parisienne de taille modeste, je me concentrais sur des objets peu volumineux qui m’évoquaient des souvenirs personnels avec mes grands-parents : des pièces de la vaisselle de ma grand-mère, grande cuisinière et maîtresse indétrônable de la maison, des bandes dessinées d’Astérix et de Lucky Luke qui avaient marqué ma jeunesse, puis je fus attiré par les nombreux livres de la bibliothèque inépuisable de mon grand-père.

 C’est ainsi que se retrouvèrent soudain entre mes mains les différents volumes légèrement écornés des « Mémoires de guerre » du Général de Gaulle, éditées à partir du milieu des années cinquante. De Gaulle, ce monument national dont j’ai si souvent entendu parler, en termes louangeurs, admiratifs, ou nostalgiques, dans des livres d’Histoire, des documentaires, des films ou lors de débats politiques. Cela faisait longtemps que j’avais envie de mieux connaître ce personnage historique mais je n’osais jusqu’ici m’atteler à cette tâche immense qui représentait pour moi l’équivalent de l’ascension d’un haut sommet intimidant qui domine tous les autres.

Cette découverte fut pour moi un signe qu’il était temps de me plonger dans ce récit historique en l’honneur de mes grands-parents. Cela me renvoyait aux conversations avec ma grand-mère lorsqu’elle me racontait ses souvenirs d’enfant pendant la période de l’Occupation. La maison de campagne familiale du Cher était située en zone libre entre Bourges et Moulins, à quelques kilomètres à l’ouest de la ligne de démarcation matérialisée par l’Allier, affluent de la Loire. Un été, son père qui travaillait à Paris en zone occupée, avait voulu rejoindre sa femme et leur fille unique restées à la campagne et, pour éviter de passer les contrôles, il arriva de la capitale avec son attirail de pêcheur puis entra dans l’Allier depuis la rive est en maniant sa canne à pêche pour ressortir de l’autre bord en zone libre sans être inquiété.

Ainsi, je me suis plongé dans ces Mémoires avec intérêt et j’ai été aussitôt captivé par ce récit personnel bien écrit, structuré, méthodique et passionnant de par les évènements historiques qu’il couvre et en étant expliqués du point de vue rare de l’un des acteurs majeurs de cette période. Ces Mémoires sont une opportunité unique de découvrir le cheminement personnel du Général de Gaulle, son raisonnement, sa stratégie basée sur sa hauteur de vue des enjeux globaux et son sens de l’anticipation, enfin son intransigeance pour préserver les intérêts et l’honneur de la France et sa ténacité pour faire face aux défis qu’il a dû relever et les graves décisions qu’il a dû longuement sous peser.

De Gaulle emploie parfois la troisième personne du singulier pour décrire certaines de ses actions, un procédé narratif certes déroutant aux premiers abords mais qui peut se justifier par le fait qu’il était déjà entré dans l’Histoire au moment où il l’a écrit. Le grand Charles se livre peu sur ses émotions et sa vie privée mais on peut deviner par moment tout le poids des enjeux qui pèsent sur ses épaules dans cette période si trouble et agitée où tous les repères vacillent.

Cette lecture permet également de suivre cette période historique du point de vue de la France Libre du Général de Gaulle avec des évènements qui sont parfois peu abordés dans les livres d’Histoire car jugés moins importants au vu des enjeux mondiaux de cette guerre mais ils sont néanmoins essentiels pour mieux comprendre certaines décisions du côté français.

Comme tout récit historique, il faut garder un regard critique et lucide en tenant compte de qui est son auteur et dans quel est contexte il écrit, on peut ainsi penser que le Général avait l’intention, au-delà d’instruire les lecteurs, d’utiliser ces Mémoires pour se replacer au centre de l’actualité politique française et se ménager des chances de revenir au pouvoir, ce qui sera le cas puisqu’il deviendra président de la République en 1959 alors que les trois tomes de ses « Mémoires de Guerre » furent publiés entre 1954 et 1959.

Sans doute de Gaulle omet parfois plus ou moins volontairement certains épisodes qui n’arrangent pas sa vision donc il est nécessaire, comme pour tout récit historique, de compléter ses connaissances avec d’autres sources afin d’avoir une compréhension plus globale mais ces Mémoires représentent pour moi un récit historique passionnant d’un des plus grands personnages de la riche Histoire de France.

Allez, il est temps à présent de répondre à l’Appel du Général !

Tome 1 : l’Appel (1940 – 1942)

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Hugues B.