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Expériences diverses

Expériences diverses

Association A Bras Ouverts (ABO)

Introduction : la découverte d’un nouveau monde

J’ai découvert l’association A Bras Ouverts (ABO, en prononçant chaque lettre) en 2012 par le biais d’amis rencontrés dans un groupe de jeunes catholiques à Paris alors que nous étions chacun à la recherche d’un moyen de nous engager de différentes manières pour venir en aide à ceux qui en avez besoin. Le principe de ABO est d’organiser des sorties le week-end à la campagne pour des jeunes porteurs de handicaps accompagnés par des bénévoles en logeant dans des maisons prêtées gracieusement par des particuliers.

J’avais déjà été impliqué dans des associations pendant mes études mais, à cette période de ma vie, je venais d’entrer dans la vie active avec un travail de cadre à plein temps et je n’étais pas certain de ma capacité d’engagement, qui plus est dans le monde du handicap que je connaissais peu, donc je décidais de commencer en participant à un week-end par trimestre pendant une année.

A l’issue de cette première expérience, on m’a proposé, à ma grande surprise, de prendre une responsabilité importante dans des circonstances que je vous décrirai plus en détails dans un autre chapitre et, après une longue réflexion, j’ai accepté. Cela a été le début d’une grande aventure de deux années très riches en rencontres, en émotions et en apprentissages divers.

A la fin de cette mission, j’ai participé à l’organisation de la grande fête des 30 ans d’ABO qui fut un évènement majeur et, en quelque sorte, le point d’orgue de mon engagement dans cette association. Ensuite, j’ai continué de participer à quelques week-ends en réduisant progressivement la fréquence puis, finalement, j’ai décidé de quitter ABO après environ cinq années d’engagement tout en me tenant régulièrement informé de son évolution par le biais d’amis encore impliqués.

Cette expérience fut pour moi comme la découverte d’un nouveau monde, elle m’a permis d’apprendre beaucoup de choses sur des aspects variés notamment le fonctionnement interne d’une association, de faire de très belles rencontres et de vivre collectivement des moments forts donc il m’a semblé intéressant et utile de vous la partager. Peut-être que cet article vous donnera envie d’y participer à votre tour ou de soutenir cette association ou tout simplement vous permettra de découvrir ce nouveau monde comme il l’a été pour moi et, éventuellement, vous en inspirer.

Bonne découverte !

Présentation de l’association

Missions et valeurs d’ABO : « être avec, faire avec »

A Bras Ouverts a été créée en 1986 par cinq jeunes hommes et femmes motivés pour venir en aide aux jeunes porteurs de handicaps et à leur famille en constatant qu’ils avaient peu de structures d’accueil adaptées et accessibles afin de sortir de leur quotidien et de s’épanouir.

Le déroulé d’un week-end ABO est assez simple : les jeunes sont accompagnés chacun par un bénévole dans un groupe constitué au maximum de sept binômes et ils partent ensemble en minibus de neuf places appelé « estafette » le samedi matin pour rentrer le dimanche en fin de journée. Le groupe fait tout ensemble à hauteur des capacités des uns et des autres : les courses au supermarché, les repas, les jeux et les dessins à la maison, les balades en extérieur, la boom dansante du samedi soir, la messe du dimanche matin puis le rangement et le nettoyage du logement avant de rentrer.

D’autres évènements sont également organisés par l’association auxquels les familles peuvent être conviées comme par exemples le rassemblement national annuel d’ABO, la fête d’anniversaire de la création d’ABO tous les cinq ans, la participation aux JMJ (Journées Mondiales de la Jeunesse, rassemblement international de jeunes catholiques) ainsi que certains pèlerinages.

L’une des plus importantes règles d’ABO qui résume selon moi son état d’esprit est « être avec, faire avec son jeune », c’est-à-dire de toujours faire en sorte d’inclure le jeune que l’on accompagne dans les activités et dans les discussions du groupe en s’adaptant à sa personnalité et à ses capacités. L’application de cette règle de vie est facilitée du fait que chaque jeune est accompagné par un bénévole, ce qui est un des grands avantages d’ABO, cela limite la capacité d’accueil mais elle augmente grandement la qualité de l’accompagnement.

Chez ABO, on part du principe que chaque jeune peut nous comprendre même s’il ne peut pas toujours parler ou s’exprimer de manière compréhensible donc on essaye au maximum de s’adresser directement à lui en posant des questions, en proposant des activités, on évite de parler de lui en sa présence à la troisième personne du singulier pour qu’il se sente considéré.

Alors, bien entendu, tout n’est pas parfait, on reste des humains parfois fatigués, à bout de patience mais on peut compter sur l’aide de l’ensemble du groupe pour nous seconder quand on finit par manquer de forces ou d’idées. C’est aussi le rôle du responsable du groupe pendant le week-end, appelé RA (Responsable d’Activités), d’être vigilant aux signes de faiblesses ou de lassitude afin de proposer au bénévole un coup de main ou de se changer les idées en aidant à la cuisine ou au rangement.

Une association d’inspiration chrétienne ouverte à tous

ABO est une association qui se dit d’inspiration chrétienne car celle-ci a joué un rôle déterminant dans l’engagement de ses membres fondateurs puis de celles et ceux qui les ont rejoints progressivement. Cette dimension chrétienne se manifeste pendant le week-end à travers un court temps de prière proposé le samedi soir aux bénévoles (non obligatoire) et la messe du dimanche matin à laquelle tout le groupe assiste. Par ailleurs, pour les bénévoles qui ont des responsabilités importantes ou qui souhaitent s’engager durablement dans l’association, il y a un groupe spécifique dénommé l’Assemblée Communautaire (l’Asscom) qui se retrouve régulièrement pour échanger et prier avec l’accompagnement d’un aumônier.

Toutefois, et comme son nom l’indique, ABO est une association ouverte à tous et il n’est pas nécessaire d’être chrétien pour participer à un week-end en tant que bénévole, l’important est que chaque personne soit en phase avec les valeurs et les règles de l’association telles que le respect des jeunes et de leur handicap, la bienveillance, l’entraide et la protection des jeunes. Cette ouverture vaut également pour les familles qui peuvent être de toutes religions ou non croyantes.

Personnellement, je trouve que cela a du sens pour ABO d’exprimer sa foi car c’est un élément essentiel qui est à l’origine de l’engagement d’un grand nombre de ses bénévoles et du moment que ce soit fait de manière relativement discrète et mesurée tout en demeurant ouvert à tous en respectant les convictions de chacun. Ainsi, je tiens à préciser que le but d’ABO n’est pas de faire du prosélytisme, il nous arrivait fréquemment d’accueillir des jeunes porteurs de handicaps issus de familles non croyantes ou d’autres religions (islam notamment) sans chercher à les convertir tout comme pour les bénévoles.

Concernant la dimension sociale, A Bras Ouverts se veut accessible à tous les budgets en demandant aux familles une participation financière dont le montant d’une quinzaine d’euros est très en dessous des coûts réels qui sont eux-mêmes réduits grâce au bénévolat et aux prêts de maisons.

ABO est une association reconnue d’intérêt général qui est financée à 75% par des dons individuels (déduction possible des impôts), ensuite viennent la participation des familles à quasi égalité avec les dons des entreprises (qui financent souvent l’achat de nouvelles estafettes). A Bras Ouverts est également soutenue par des particuliers qui mettent à disposition leur maison secondaire pendant quelques week-ends par an.

Si vous souhaitez apporter votre soutien à cette association par un don financier ou le prêt d’une maison ou tout simplement en savoir plus sur ABO, n’hésitez pas à consulter le site internet : https://www.abrasouverts.fr/

Le groupe, unité de base autonome

L’association ABO est divisée en groupes composés d’environ une trentaine de jeunes et d’une cinquantaine de bénévoles et chacun de ces groupes dispose d’une estafette personnalisée pour se déplacer pendant les week-ends. Il y a une trentaine de groupes répartis dans une dizaine de grandes villes françaises dont une quinzaine de groupes basés à Paris qui est un grand vivier de jeunes adultes étudiants ou actifs. Chaque groupe porte un nom joyeux aux évocations de fêtes et de voyages avec parfois un indice sur leur ville d’origine : « Les Baladins », « La Grande Vadrouille », « La Mélodie du bonheur », « L’île aux Trésors » (groupe lillois) … Le groupe dont je faisais partie se nomme « A La Belle Etoile ».

Chaque groupe est autonome pour recruter des accompagnateurs, accueillir de nouveaux jeunes et organiser des week-ends en fonction de sa capacité tout comme pour prendre des initiatives par exemples en invitant les familles pour des évènements particuliers ou en prévoyant des animations avec les accompagnateurs et leurs amis afin de faire connaitre le groupe et ABO.

Il y a beaucoup d’acronymes qui sont utilisés chez ABO pour faciliter la communication en interne et cela demande un petit temps d’adaptation au début pour en connaitre la signification, comme lorsque l’on arrive dans une nouvelle entreprise. Généralement, ces acronymes désignent des titres de responsabilités au sein d’ABO et des noms de groupes. Ainsi, je fus dans le passé le RG de ALBE et membre de l’Asscom, c’est-à-dire le Responsable de Groupe d’A La Belle Etoile et membre de l’Assemblée communautaire.

Chaque groupe d’ABO est géré par une « petite équipe » (la PE, en prononçant chaque lettre) composée de quatre personnes avec un(e) responsable de groupe (RG) qui a en charge notamment l’animation du groupe ainsi que la relation avec les familles et les jeunes, un(e) responsable des accompagnateurs (RACC) qui s’occupe du recrutement de nouveaux bénévoles et de l’organisation de dîners entre accompagnateurs dans des appartements pour se raconter nos week-ends ABO et maintenir le lien entre nous afin de se motiver à continuer notre engagement, un(e) responsable communication et témoignages (RT) dont le rôle est à la fois d’attirer de nouveaux accompagnateurs à travers des témoignages extérieurs ou apéros tels que les « ramènes tes potes » ainsi que de fidéliser ceux qui font déjà partie du groupe grâce à des supports de communication en tout genre (gazettes, cartes de vœux, soirées témoignages …) et un(e) responsable maisons (RM) qui gère les relations avec les propriétaires mettant à disposition leurs logements et qui en cherche de nouveaux.

A cette équipe s’ajoute les Responsables d’Activités (RA) qui ont la charge du groupe de jeunes et de bénévoles pendant le week-end où ils sont inscrits. Les RAs sont un élément essentiel pour la vitalité du groupe car leur nombre et leur disponibilité déterminent la quantité de week-ends pouvant être proposés aux familles dans l’année. On peut dire qu’ils forment en quelque sorte le noyau dure du groupe avec la PE.

Il y a également un référent de l’équipe national qui est attitré à chaque groupe pour aider à l’organisation de l’élection du RG ainsi que de son accompagnement pendant toute la durée de sa mission en partageant des conseils tout en suivant l’activité du groupe à distance en lisant les différentes communications ou quelques fois en présentiel. Le référent permet aussi de faire le lien entre le groupe et le bureau national d’ABO en informant ce dernier des actualités du groupe et en le consultant pour certains sujets.

Les responsables de la PE exercent leur mission sur un mandat de deux ans, non renouvelable, ce qui présente les avantages de permettre à d’autres accompagnateurs de prendre la relève mais aussi de pouvoir se projeter dans le temps pour celles et ceux qui acceptent cet engagement important nécessitant parfois des compromis avec leurs objectifs professionnels et personnels. Néanmoins, il est possible, et assez fréquent, pour les membres de la PE qui souhaitent continuer de s’investir après la fin de leur mission d’exercer une nouvelle responsabilité dans le groupe ou au niveau national. A la fin du mandat de la PE, des bénévoles du groupe sont présélectionnés en vue d’élire un(e) nouveau RG via un premier tour de votes par un ensemble de bénévoles engagés et expérimentés de ce même groupe après une présentation de chacun et un temps d’échange. Puis, si les personnes présélectionnées se sentent prêtes à assumer cette responsabilité, il y a un second tour de vote afin d’élire le nouveau ou la nouvelle RG. Ensuite, celui ou celle-ci propose à d’autres bénévoles de le rejoindre dans l’équipe suivant les conseils de l’ancienne PE.

Le bureau national donne le cap et maintient la cohésion

L’organisation d’ABO est à la fois structurée et bien organisée tout en restant flexible pour donner de l’autonomie aux groupes qui la composent et en faisant confiance à ses jeunes bénévoles pour prendre des initiatives en étant accompagnés si nécessaire.

Il y a un réel état d’esprit de bienveillance et de confiance à ABO, ce qui n’empêche pas d’avoir de la rigueur et de la vigilance sur les sujets essentiels en s’assurant que les bénévoles soient bien formés et disposent de documents de référence de qualité, c’est un mélange de souplesse et de robustesse. Le bureau national et ses référents sont tels un tronc d’arbre solide et bien enraciné qui permet aux branches qui sont les groupes de pousser librement dans différentes directions tout en s’appuyant sur leur base commune qui les soutient, les rassemble et leur permet de se nourrir de la même sève : l’état d’esprit d’ABO.

J’ai eu la possibilité de mieux comprendre l’organisation d’ensemble d’ABO lorsque je suis devenu RG du groupe A La Belle Etoile, notamment lors de l’assemblée générale (AG) qui rassemble chaque année le bureau national, les RG de chaque groupe et les référents.

Pour ma première AG, cela faisait à peine quelques semaines que j’étais RG et je connaissais peu de monde chez ABO, j’avais seulement croisé quelques accompagnateurs d’autres groupes parisiens au départ et à l’arrivée d’un week-end et j’avais une vision assez confuse du fonctionnement de cette association au-delà de mon groupe.

Donc ce fut pour moi comme la découverte d’un nouveau monde lorsque chaque membre du bureau national nous présenta de manière détaillée les résultats de l’année pour ABO avec le nombre de sorties et d’évènements organisés, le nombre et le profil (âge, sexe…) des jeunes et de leurs accompagnateurs, les dépenses et les recettes par catégories. Ce fut pour moi l’occasion de découvrir toute l’ossature d’ABO avec ses nombreux groupes et le bureau national qui supervise et coordonne tout cet ensemble.

Le bureau national est dirigé par le président d’ABO qui est élu par les membres de l’AG pour un mandat de quatre ans afin de garantir une certaine stabilité à l’action de l’association. Le bureau national est composé de sept membres : le président, le vice-président en charge des référents, le trésorier, le responsable de l’Asscom, le responsable communication et témoignages national, le responsable accompagnateurs national et le responsable enfant national. Enfin, il y a une salariée à ABO qui aide pour différentes tâches administratives ainsi que pour la gestion d’un local où sont entreposés différents documents et équipements d’ABO à Paris.

Les présentations des différents membres du bureau national pendant l’AG étaient sous formes de fichiers Powerpoint avec des slides détaillés, chiffrés, visuels et synthétiques, ils étaient présentés par des bénévoles du bureau national qui mettaient probablement à profit les compétences en analyses et en communication qu’ils avaient acquises lors de leurs études et pendant leurs activités professionnelles. J’avais l’impression d’être à l’assemblée générale d’une entreprise sauf qu’au lieu de parler de produits, de gains de productivité et de parts de marchés on parlait avant tout d’êtres humains et de relations sociales, la finalité de notre activité me semblait alors davantage porteuse de sens et donc plus motivante que celles de la plupart des entreprises et puis c’était aussi pour moi l’attrait de la nouveauté.

L’idée n’est pas d’opposer le monde de l’entreprise et celui de l’associatif car ils se complètent bien souvent, le premier permettant d’acquérir des compétences techniques pointues, un état d’esprit pragmatique de recherche d’efficacité et d’améliorations, de participer à la production de produits ou de services pouvant être utiles et même nécessaires à la société (c’est là que souvent il peut y avoir une interrogation), une rémunération pour subvenir à ses besoins et à ses envies matérielles ainsi que de financer le monde associatif tandis que le second permet de développer certaines compétences plus axées sur l’humain, le service à la personne, de donner davantage de sens et de sentiment d’accomplissement dans la vie afin d’enrichir humainement ses bénévoles et en faire bénéficier ensuite leurs employeurs privés grâce à une meilleure motivation et une plus grande ouverture d’esprit de leurs salariés engagés.

Dans son ensemble, j’ai trouvé l’organisation et le mode de fonctionnement d’ABO très pertinents et ils pourraient clairement être répliqués avec succès dans d’autres associations ou même en partie dans le secteur privé, je retiens notamment le bénéfice de faire confiance aux jeunes du moment qu’ils sont motivés et bien accompagnés, ils peuvent accomplir ensemble de grandes choses. Par ailleurs, j’ai apprécié cette organisation interne démocratique avec des règles clairement édictées et des membres expérimentés pour éviter l’anarchie et garder le cap.

Vous trouverez ci-dessous un schéma que j’ai réalisé pour présenter le fonctionnement général de ABO.

Schéma de présentation du fonctionnement général de ABO

Les accompagnateurs, l’énergie qui fait tourner la machine ABO

Recrutement par réseaux, participation sans engagement, accompagnement des responsables

Pour recruter des bénévoles qui sont essentiels à son activité, ABO s’appuie principalement sur les réseaux de ses membres sachant qu’à Paris c’est particulièrement efficace car il y a une grande et dynamique communauté de jeunes adultes catholiques en comparaison des autres villes françaises.

Pour ma part, j’ai contribué modestement à l’engagement progressif de mon cousin François lors de l’organisation des 30 ans d’ABO, cette expérience lui a plu et il continua ensuite de faire des week-ends avec son groupe dont il devint plus tard le RG, une belle histoire ! Nos exemples servirent ensuite sans doute d’inspiration à certaines de nos cousines qui participèrent ou participent encore à quelques week-ends avec ABO. J’avais proposé également à des amis proches et à d’autres membres de ma famille mais ce n’est pas forcément une expérience qui attire tout le monde même si elle suscite le respect ou parfois l’admiration, chacun a ses propres envies et capacités.

En effet, le contact avec des personnes porteuses de handicaps peut être redouté car nous n’y sommes généralement pas habitués étant donné que nous ne les côtoyons pas souvent donc on peut parfois être dérouté ou se sentir incompétent pour passer du temps avec ces personnes. Néanmoins, ABO ne demande pas à ses nouveaux accompagnateurs de compétences particulières, de diplômes ni de certifications pour participer à un week-end, c’est plutôt un état d’esprit ouvert et bienveillant qui est nécessaire avant tout. De plus, les nouveaux membres sont sensibilisés à ces aspects en étant accompagnés par des membres plus expérimentés.

Par ailleurs, il n’y a pas de durée minimale d’engagement qui est demandée aux bénévoles lambdas si ce n’est de s’impliquer pleinement sur le week-end auquel ils participent. Certains peuvent faire un seul week-end et ne plus revenir, d’autres deux ou trois week-ends par an. Là aussi, je trouve que c’est un bon moyen d’inciter les jeunes à découvrir cette activité peu connue et parfois redoutée.

Toutefois, pour les personnes volontaires à exercer des responsabilités dans ABO, par exemple dans la PE d’un groupe ou comme RA, il est demandé de s’engager sur une durée et une fréquence minimale afin de bien connaitre les jeunes, les accompagnateurs et l’esprit de l’association. Il y a également des formations spécifiques à leurs missions qui sont dispensées en interne par d’autres membres plus expérimentés.

Un intranet est par ailleurs disponible sur le site en ligne d’ABO avec des droits d’accès en fonction des responsabilités de chacun afin de consulter et télécharger des documents de formation ou des formulaires standards à imprimer comme par exemples des comptes rendus de missions ou des attestations d’autorisation pour les parents.

Des jeunes bénévoles motivés pour aider et prendre des responsabilités

Les accompagnateurs à ABO ont entre 18 et 35 ans avec une moyenne d’âge qui était à mon époque aux alentours de 28 ans, il y a environ deux tiers de jeunes actifs et un tiers d’étudiants et un peu plus de femmes que d’hommes (probablement un ratio de 70% / 30%).

Participer à l’association A Bras Ouverts en tant qu’accompagnateur, c’est rencontrer d’autres bénévoles aux parcours et profils différents mais qui se rejoignent dans leur volonté d’aider et de se rendre utile. Certains sont très investis et y consacrent de nombreux week-ends et soirées en semaine sans être rémunérés et en plus d’une activité professionnelle parfois elle-même très prenante. Néanmoins, ils sont rétribués d’une autre manière car ce n’est pas un « travail » comme les autres, c’est une activité pleine de sens où l’on peut éprouver de manière très concrète le bonheur apporté aux enfants et aux familles auquel chacun contribue et ce n’est pas à sens unique car bien souvent cette joie se partage et les accompagnateurs apprennent aussi beaucoup humainement de la part des jeunes et des autres bénévoles.

A Bras Ouvert, c’est aussi un lieu de rencontres, de sociabilité et, pour les bénévoles plus engagés, l’opportunité d’exercer des responsabilités dans un domaine atypique en faisant partie d’un collectif pour organiser des week-ends à la campagne ou des évènements festifs, préparer des costumes, imaginer des animations et des menus gourmands, décorer une estafette… Il y a beaucoup de place pour la créativité et les initiatives en tous genres !

J’ai remarqué de fortes similitudes entre ABO et les associations d’étudiants que j’avais découvertes pendant mon école d’ingénieur. Là aussi, des jeunes s’investissaient à fond en parallèle de leurs études et sans aucune rémunération parce qu’ils étaient motivés par la finalité de leur engagement (un évènement sportif, festif ou culturel bien souvent), par les nouvelles et parfois hautes responsabilités qu’ils pouvaient exercer en grande autonomie, ce qui était rare à leur âge, et aussi pour le côté social : faire partie d’une équipe, rencontrer des gens autour d’un projet commun.

Il peut également y avoir des motivations un peu moins altruistes comme obtenir de la visibilité, acquérir un certain statut social prestigieux ou ajouter une belle ligne sur son CV mais l’action reste tout de même louable et c’est bien aussi de penser à soi car, quand les intérêts des uns convergent avec les siens, la force de motivation en est décuplée. 

Par exemples, je fus très impressionné et même surpris pendant mes études de voir des camarades de promotion faire des petits boulots sur leur temps personnel afin de récolter de l’argent pour animer de grandes fêtes étudiantes ou d’accomplir une tâche un peu ennuyante comme se positionner à une intersection sur le parcours d’un raid sportif pour indiquer le bon chemin mais ils étaient motivés car ils se sentaient faire partie d’un collectif pour l’organisation d’un évènement important.

A ABO, j’ai rencontré beaucoup de personnes dynamiques et très investies dans leurs missions qui m’ont donné de l’inspiration et qui m’ont aussi aidé à supporter l’intensité de mon engagement car, comme j’ai pu le constater lors de ma grande traversée de l’Eurasie (lien blog), on trouve toujours plus audacieux que soit !

Par exemple, je fis la connaissance de Gaëtan qui fut responsable de mon groupe avant moi puis fut élu président de ABO, c’est la plus haute responsabilité de l’association avec de nombreuses réunions et des participations à de multiples évènements tout en partant régulièrement en week-ends ABO. Cela n’a pas empêché Gaëtan d’exercer un travail de cadre à responsabilité, d’organiser son mariage avec sa femme Marion qui était également RT dans ma PE et de s’entraîner intensivement pour une épreuve de triathlon Iron Man très physique tout cela en gardant le sourire et la bonne humeur !

J’ai été également impressionné par Guillemette, notre cheffe d’équipe pour l’organisation des 30 ans d’ABO. Pendant de longs mois, Guillemette a démontré une grande capacité de travail, d’organisation et de prise de décision tout en exerçant son métier de sage-femme. Elle a su insuffler beaucoup d’énergie dans ce projet en s’y investissant pleinement et en nous montrant la voie, « Lead by example » comme on disait dans mon ancienne entreprise américaine.

Il y a beaucoup d’autres exemples de personnes investies et dynamiques comme Gaëtan et Guillemette que j’ai rencontrées à ABO.

Les jeunes, la raison d’être d’ABO

L’accueil de nouveaux jeunes

A Bras Ouverts peut accueillir des jeunes à partir de l’âge de 6 ans et jusqu’à 14 à 18 ans suivant les spécificités locales des groupes puis, dès lors qu’ils font partie d’un groupe, il n’y a plus vraiment de limite d’âge tant que les conditions le permettent. Ainsi, nous avions dans notre groupe des « jeunes historiques » qui partaient depuis longtemps avec A La Belle Etoile et qui approchaient de la quarantaine même si la majorité des jeunes avaient entre 8 et 20 ans.

Lorsque j’étais RG du groupe A La Belle Etoile, j’ai eu notamment pour mission l’accueil de nouveaux jeunes lorsque nous avions une bonne dynamique dans notre groupe avec de nombreux accompagnateurs partant souvent ou lorsque certaines jeunes étaient moins disponibles ou ne partaient plus. Dans ce cas, la responsable au niveau national de la liste d’attente des inscriptions nous transmettait les contacts de la famille d’un jeune avec une fiche de présentation.

Ensuite, je contactais la famille pour me présenter et prendre des nouvelles afin notamment de vérifier si la situation avait évolué car le temps d’attente pour les familles fluctuait en fonction de la dynamique des groupes de chaque ville entre un et deux ans. Puis, un rendez-vous était fixé chez la famille afin de mieux se connaitre et préparer l’accueil du jeune dans les meilleures dispositions. Nous venions à deux accompagnateurs expérimentés du groupe, généralement un après-midi pendant le week-end.

Ce fut pour moi l’occasion d’en apprendre davantage sur les jeunes avec qui nous partions en découvrant leur cadre familial. Nous avons toujours été bien accueillis par les familles qui avaient de nombreuses interrogations sur le fonctionnement de notre association et, même si elles attendaient notre venue depuis longtemps, elles éprouvaient également parfois de l’appréhension à l’idée de nous laisser tout un week-end leur enfant sensible émotionnellement et physiquement.

C’était souvent une première pour leur jeune de quitter la famille pendant le week-end en raison de leur jeune âge et du manque de structures d’accueil adaptées à leur handicap donc le but de notre visite était à la fois de découvrir l’enfant et sa famille mais aussi de présenter plus en détails notre association et de répondre aux éventuelles craintes des parents.

Le fait d’avoir un accompagnant pour chaque jeune était souvent rassurant pour les familles et nous leurs expliquions le déroulé d’un week-end avec les règles d’attention pour le bien-être et la sécurité des jeunes. Nous remettions également un fascicule de présentation de ABO ainsi qu’un dossier à remplir avec des informations précises sur leur enfant afin de préparer au mieux son accueil dans notre groupe : ses traits de caractère, ce qu’il aime faire ou ce qui lui déplait, ses goûts en tous genres, des conseils pour l’aider à se calmer en cas de crise ou pour aller se coucher, son traitement médical et ses allergies s’il y en a…

Ensuite, le RG en fait une fiche résumée qui est mise à jour après chaque week-end du jeune ou en fonction des nouvelles fournies par la famille afin de briefer l’accompagnateur avec les toutes dernières informations. Bien entendu, ces informations personnelles sont conservées scrupuleusement à l’abris d’éventuels regards indiscrets et n’est communiqué aux accompagnateurs que ce qui est nécessaire en tâchant de respecter au mieux l’intimité des familles et du jeune.

A noter que l’on demande très peu d’informations à ABO sur le diagnostic du handicap du jeune, il est généralement résumé sous un nom technique ou en quelques mots mais sans trop de détails car nous n’avons pas pour but d’apporter des soins médicaux ou spécialisés ni même vocation à éduquer ces jeunes, ces missions revenant à des professionnels du métier ainsi qu’à leurs familles. Ainsi, ABO ne peut accueillir pour ces raisons des jeunes nécessitant des actes médicaux pendant le week-end telle qu’une piqûre. Nous nous intéressons principalement au caractère du jeune, à ses goûts, à ses envies pour que nous puissions adapter au mieux son intégration dans le groupe.

Le profil des jeunes et des familles que j’ai rencontrés

Lors de mon engagement de RG chez ABO, j’ai pu observer différentes situations familiales dans des environnements sociaux variés pour les jeunes. Il y a des familles unies malgré les difficultés, parfois des mères isolées ou qui se dédient quasiment entièrement à leur enfant pour pallier au manque d’établissements adaptés ou trop éloignés, certains parents préférant parfois s’occuper eux-mêmes de l’éducation de leur enfant afin de s’assurer qu’ils soient dans de bonnes conditions.

Suivant différents cas, le jeune peut vivre dans sa famille ou bien il est parfois en internat dans un établissement spécialisé, certains jeunes adultes peuvent aussi avoir une activité professionnelle à laquelle ils se rendent en transport en commun de manière autonome.

Il y a une grande diversité également chez les jeunes avec des handicaps de nature différente à la fois physique et mental, certains peuvent parler distinctement tandis que d’autres s’expriment par une expression du visage, des exclamations ou des gestes. Il y a des jeunes qui comprennent bien ce qu’on leur dit mais peuvent difficilement communiquer donc on s’aide de gestes, de dessins ou on utilise des questions fermées pour qu’ils puissent répondre d’un hochement de tête. Certains jeunes sont autonomes pour manger, faire leur toilette tandis que d’autres ont besoin d’aides, il y a des jeunes qui marchent sans difficultés alors que d’autres se déplacent en fauteuil roulant ou ont besoin qu’on leur tienne la main. ABO essaye de s’adapter à chaque jeune en l’intégrant au sein du groupe dans le respect de sa différence.

Mes expériences de diverses responsabilités chez ABO

Comment je suis devenu Responsable de Groupe (RG)

Lorsque l’on me proposa de devenir le RG du groupe d’A La Belle Etoile, j’avais 26 ans, j’avais fait à peine quatre week-ends ABO et j’avais très peu d’expérience d’encadrement d’un groupe de jeunes comme par exemples chez les scoots ou dans un centre de colonies de vacances, je n’avais même pas le BAFA ! Donc cela me surprit que des personnes pensent à me confier une responsabilité aussi importante et je pensais décliner.

Mais la référente du groupe, Mariane, m’expliqua que je n’étais pas un cas isolé, il y avait déjà eu des RG avec peu d’expérience et ils avaient bien accompli leur mission. Mariane me donna les coordonnées de certains d’entre eux pour en discuter et elle me partagea également des textes de réflexion sur la responsabilité dans le monde associatif en général et à ABO en particulier qui étaient très instructifs. J’avais droit à deux semaines de réflexion et je finis par dire oui car les échanges que j’avais eu avec d’anciens RG et les documents que j’avais lu m’avaient inspiré confiance.

De plus, j’étais à un moment de ma vie où j’avais envie de changements, de relever de nouveaux défis, j’hésitais notamment à partir faire un tour du monde sous l’influence de nombreux voyageurs (je ferai finalement ce grand voyage neuf ans plus tard en traversant l’Eurasie : lien blog). En y réfléchissant, cette proposition me semblait être une opportunité de découvrir un nouveau milieu, une sorte de voyage mais local, et j’étais sensible au fait que des personnes expérimentées aient pensé à moi pour ce poste, qu’ils me fassent confiance.

J’étais désormais curieux de découvrir davantage ABO et je me sentais prêt à relever le défi de cet engagement pendant deux années. Cela me paraissait long mais je comprenais que cela nécessitait du temps pour prendre ses marques et, personnellement, cela me rassurait de savoir que cette responsabilité avait une durée limitée car je pouvais plus facilement me projeter et m’investir pleinement dans cette mission quitte à faire certaines concessions dans ma vie personnelle et professionnelle sachant que ce serait temporaire. Cela me semblait donc une bonne formule et, au final, ces deux années passèrent relativement vite.

La seconde étape était de former une nouvelle petite équipe mais je connaissais peu d’accompagnateurs étant donné que je n’avais fait que quatre week-ends donc je fus conseillé par l’ancienne PE.  Chacune des accompagnatrices que j’ai contactées accepta assez rapidement sa mission et nous fûmes rapidement au complet en à peine une quinzaine de jours : Marine serait notre RACC (responsable des accompagnateurs de l’ensemble du groupe), Marion notre RT (responsable communication et témoignages)  et Carol notre RM (responsable maison). On ne se connaissait pas et on avait peu d’expérience à ABO mais on fut bien accompagnés par l’ancienne PE et on s’entendit rapidement ensemble pour mener à bien nos missions dans la bonne humeur.

La mission de RG au sein de la Petite Equipe et du groupe

En termes d’investissement personnel, en acceptant de devenir RG chez ABO, on s’engage sur une durée de deux ans à partir au moins 25 jours par an avec son groupe, ce qui correspond à environ un week-end par mois et un séjour l’été, afin de bien connaitre les jeunes et les accompagnateurs ainsi que d’être pleinement investi dans l’activité du groupe. A cela s’ajoute quelques jours supplémentaires pour de la formation et la participation à l’assemblée générale donc environ une trentaine de jours en tout sur l’année. Il faut ensuite compter environ un soir par semaine pour une réunion d’équipe ou un dîner entre accompagnateurs et environ une heure par jour pour le suivi et l’organisation de l’activité du groupe (contact avec les familles, gestion des inscriptions sur les week-ends, brief et débrief avec les RA…). Bien entendu, cela dépend de l’activité du groupe et de la méthode d’organisation personnelle du RG mais c’était à peu près ce que je faisais.

C’est donc un engagement conséquent mais je trouve que cela a du sens afin de s’investir pleinement dans cette responsabilité car un mandat de deux ans c’est à la fois long et court et c’est une occasion unique d’exercer ce type de mission où l’on reçoit autant en belles rencontres et en moments de joie que ce que l’on donne en temps et en énergie. C’est aussi une responsabilité plus facile à accepter lorsque l’on n’a pas encore fondé une famille ou que l’on n’a pas une autre activité trop prenante.

Pendant ces deux années, avec la PE et l’ensemble de notre groupe, nous avons pu organiser beaucoup de week-ends (environ deux à trois par mois et deux séjours l’été) dont certains spéciaux comme notre week-end de fête dans une immense propriété du nom de La Madeleine qui est située en plein milieu des forêts de Sologne à proximité d’Orléans. C’est une grande maison de particuliers qui est mise à la disposition d’ABO quasiment toute l’année, La Madeleine est très pratique pour les grands rassemblements car elle dispose de plusieurs dortoirs, d’une grande cuisine et d’un vaste jardin autour avec des jeux en plein air dont un trempoline. Nous portions de beaux costumes de fête, il y avait un atelier de décoration de notre toute nouvelle estafette avec des pochoirs en formes d’étoiles, de croissants de lune et du logo de notre groupe, nous avons préparé des repas gargantuesques avec des plats de toutes les couleurs et on s’est déhanchés sur des tubes envoûtants pendant la boom du samedi.

Nous avons également organisé des rassemblements de notre groupe avec la présence des parents en partageant des crêpes à La Chandeleur ou en organisant une sortie de fin d’année sur une journée en visitant un aquarium ou un zoo suivi d’un piquenique collectif.

Parfois, on avait aussi l’opportunité de participer à des évènements assez originaux comme par exemple un rallye auto sur un circuit automobile suite à l’invitation d’une association d’amateurs de vieilles voitures, il ne s’agissait pas d’une course de vitesse mais plutôt d’un défilé d’anciennes voitures dans un style seventies et nous avions eu la chance avec certains jeunes du groupe de pouvoir monter à bord de certains de ces bolides munis d’un casque de protection en faisant quelques tours de pistes à vitesse réduite, c’était très amusant à la fois pour les jeunes et leurs accompagnateurs !

Je me souviens également d’un grand séjour en été dans le Perche où nous avions fait une sortie à la piscine et en calèche tractée par un immense cheval Percheron, c’était très sympa, on avait le temps de se connaitre, de s’habituer aux lieux, on était moins pressé et donc on pouvait se permettre de faire une grasse mat, de laisser le temps couler avec les jeunes comme en vacances alors qu’en week-end c’était un peu plus chronométré.

Je retiendrai également de nombreux moments de complicité entre les jeunes, même sans l’usage de la voix, par un regard, par un geste. Ces jeunes qui pouvaient exprimer leur joie de vivre et leurs talents au sein du groupe l’espace d’un week-end. C’est également le regard brillant et le sourire des parents qui nous remerciaient chaleureusement d’une poignée de main à nos retours de week-ends qui nous remplissaient de joie et du sentiment de se rendre utile.

Nous avons eu la chance que l’activité de notre groupe ALBE soit en progression constante pendant le mandat de notre PE notamment grâce à l’action de Marine notre Racc. Ainsi, nous avons terminé par un week-end du Réveillon du Nouvel An avec une quinzaine de binômes, ce qui fut le plus grand week-end organisé par notre petite équipe et nous y étions tous présents avec les accompagnateurs et les jeunes qui partaient le plus souvent dans notre groupe. Ce fut une très belle manière de clôturer notre mandat en sachant qu’une nouvelle PE prenait la relève et dont les membres étaient présents également à ce week-end avec Carol notre ancienne RM qui devenait la nouvelle RG, c’était comme un passage de flambeau.

Nous avions le sentiment du devoir accompli et la satisfaction de savoir que l’activité du groupe allait continuer dans la même dynamique et même l’accélérer. Cette croissance d’activité est en partie dû à un phénomène de cercle vertueux qui fonctionne ainsi : lorsqu’une bonne ambiance se crée dans un groupe avec des accompagnateurs motivés alors cela donne envie aux nouveaux de revenir et de s’investir puis, si certains d’entre eux ont un bon réseau de jeunes amis volontaires et motivés comme c’était le cas avec notre RACC Marine, alors cela fait un effet de levier très important.  

Après tout ce que nous avions vécu ensemble pendant ces deux années, nous avions créé des liens forts entre membres de la PE avec Marine, Carol et Marion et l’on resta en contact pendant un moment, en s’organisant des petites soirées retrouvailles ou en participant aux mariages successifs des unes puis, le temps, la distance et la vie de famille nous éloigna assez logiquement mais les souvenirs demeurent et nous aurons toujours l’occasion de nous retrouver avec plaisir pour nous les remémorer ensemble.

La mission de Responsable d’Activités (RA)

Pour avoir exercé les deux responsabilités de RG et de RA, selon moi c’est celle de RA qui a la charge la plus importante même si c’est sur une durée limitée car c’est cette personne qui s’occupe d’un groupe de jeunes et d’accompagnateurs pendant tout un week-end alors que pour le RG il s’agit davantage de missions d’organisation, de coordination, de communication mais sur une durée plus étendue. De toute façon, étant donné que la responsabilité de RG se cumule généralement avec celle de RA, au final cette combinaison des deux missions demeure la charge la plus élevée du groupe.

Ce sont les RA et la PE du groupe qui identifient lors des week-ends les accompagnateurs avec un potentiel pour devenir RA, il faut qu’ils aient fait au moins plusieurs week-ends avant de leur proposer. S’ils acceptent cette responsabilité, alors ils doivent suivre une formation en interne sur un week-end où on leur remet un classeur très complet avec une présentation détaillée de ABO et de la mission de RA avec notamment les règles de vie et les points de vigilance sur la sécurité des jeunes.

Ensuite, pour valider la formation de RA, l’aspirant RA participe à un week-end avec un RA expérimenté suppléant afin de s’assurer que les fondamentaux sont acquis et de partager quelques conseils. Si tout s’est bien passé et que l’aspirant RA se sent prêt à remplir cette mission, alors il peut participer à un week-end en tant que RA sur une fréquence d’au moins trois week-ends par an afin de rester opérationnel. Il y a également des formations de mises à jour qui sont proposées aux RA environ tous les deux ans.

Être RA, cela demande de la préparation en amont puis une attention constante pendant les deux jours du week-end qui passent relativement vite entre les courses, les repas, les balades, la messe et les trajets. Parfois, les groupes peuvent aller jusqu’à sept binômes (14 personnes) avec certains jeunes qui peuvent avoir des comportements difficiles à gérer ou qui nécessitent de la vigilance et de la patience. C’est pourquoi il est aussi crucial pour les groupes d’avoir des accompagnateurs qui partent assez régulièrement sans être forcément RA car c’est très utile d’avoir le support de membres expérimentés en plus du RA.

En amont du week-end, le RA est briefé par le RG sur les jeunes dont il aura la charge avec les dernières informations les concernant (points d’attention sur certains comportements à maîtriser ou des traitements à suivre par exemples) et il est également briefé par le RACC sur les bénévoles qui participeront (profil, expérience dans ABO) ainsi que par la RM pour le logement si nécessaire (une fiche d’utilisation indique toutes les informations nécessaires).

Les binômes entre jeunes et accompagnateurs sont définis à l’avance par le RG et le RACC mais le RA peut émettre des suggestions. Le RA garde également avec lui une fiche sur chaque jeune qui a été remplis par le RG avec les informations détaillées fournies par les familles dans le cas d’une intervention d’urgence (hospitalisation) ou de doute sur une information pendant le week-end (allergies, prise de médicaments…).

Ensuite, c’est le RA qui détermine la répartition des chambres entre jeunes et accompagnateurs en tenant compte de la configuration du logement et du profil des jeunes (accessibilité pour les personnes en fauteuil par exemple) et en s’assurant de ne jamais laisser un jeune seul dans une chambre avec un accompagnateur car ABO est très vigilant pour éviter tous risques de pédophilie et forme ses RA en conséquence. Sur ce point, le RA passe également pendant la toilette du jeune si elle nécessite l’aide d’un accompagnateur (dans ce cas les binômes sont non mixtes) afin de s’assurer que tout va bien et évite qu’un binôme s’isole du groupe.

A la fin du week-end, il y a un compte rendu à faire par le RA pour résumer les activités du week-end, la configuration des chambres et partager quelques informations utiles sur les jeunes et les bénévoles qui serviront au RG et au RACC afin d’en tenir compte dans l’organisation des prochains week-ends ainsi que pour partager ces informations aux autres RA. Le référent reçoit également une copie du compte rendu du week-end.

Personnellement, cela me prenait quasiment un week-end entier du vendredi soir pour me préparer jusqu’au dimanche soir pour faire le compte-rendu avec une concentration en continue pendant le week-end pour garder la maîtrise des évènements tout en essayant quand même de garder une ambiance détendue. A la fin, j’étais rincé mais content de ce que l’on avait vécu, j’avais le sentiment de m’être rendu utile et d’avoir également beaucoup reçu en échange de la part des jeunes et des accompagnateurs, c’est un apprentissage de la vie en communauté.

Avec l’expérience, on acquiert davantage de sérénité avec des automatismes et des techniques déjà éprouvées, on est plus à l’aise avec certaines situations déjà vécues mais cela reste quand même une responsabilité à ne pas prendre à la légère car on a la charge d’autres personnes et d’enfants notamment.

L’organisation de la fête des 30 ans d’ABO

On m’a proposé d’intégrer l’équipe d’organisation des 30 ans d’ABO quelques mois après avoir terminé mon mandat de RG et, là encore, j’ai hésité car je voulais avoir plus de temps pour ma vie perso. Mais, cette fois-ci, il s’agissait d’une mission moins chargée que RG et sur une durée plus courte de six mois et puis, c’était un très bel évènement unique à organiser qui rassemblerait des centaines de jeunes et d’accompagnateurs d’ABO de toute la France sur un week-end entier : j’ai donc accepté.

Ce rassemblement eu lieu en novembre 2016 dans le très beau château de Mesnières en Brai qui a été reconverti en lycée professionnel avec internat et qui dispose donc de grands dortoirs et d’un large réfectoire, ce qui correspondait tout à fait à notre besoin. Pour la petite histoire, je m’étais arrêté par hasard trois ans plus tôt devant ce château pour me prendre en photo lors de mon périple à vélo pour rejoindre Londres depuis Paris (cf article blog).

L’équipe d’organisation était constituée de six à sept membres expérimentés de différents groupes d’ABO, tous très motivés et très investis dans leurs missions avec de grandes capacités d’organisation tout en restant de bonne humeur. C’était très agréable et instructif de faire partie de leur équipe, j’ai notamment souligné le dynamisme de notre responsable Guillemette dans un chapitre précédent.

Je suis arrivé dans l’équipe alors que la préparation avait déjà commencé depuis plusieurs mois et j’avais des responsabilités plus limitées que les autres membres, ce qui m’allait très bien car j’avais besoin de souffler après la responsabilité de RG. Puis, la charge de travail a augmenté, et l’adrénaline avec, à mesure que nous nous rapprochions de l’évènement pour être sûr que tout soit prêt à temps.

Certains s’occupaient de la réservation des moyens de transport pour acheminer les participants de toute la France (en avion, en train, en bus…), d’autres de la commande d’équipements de tous types pour la décoration ou la signalisation dans les locaux, certains se chargeaient de recruter des bénévoles pour nous prêter main forte pendant le week-end, il y avait aussi les animations et spectacles à prévoir, les menus, la répartition des logements…

C’était toute une logistique avec plein de points de détails à décider, il fallait également promouvoir l’évènement pour avoir un maximum de participants puis gérer la communication avec chacun des groupes. Pendant le week-end, nous échangions entre membres de notre équipe à l’aide d’une application téléphone qui fonctionnait comme un talkie-walkie, cela faisait très pro !

Nous avions un fichier Excel à la hauteur de cet évènement et quasiment aussi complexe que la plupart de ceux que l’on utilisait dans mon ancienne entreprise : des dizaines d’onglets avec de multiples listes et tableaux croisés dynamiques qui étaient alimentés par un fichier d’entrée fourni par chacun des groupes d’ABO et mis à jour à l’aide d’une macro que j’avais reprise et améliorée. Voilà l’une de mes missions avec également la signalisation sur site (plans, panneaux…) et la gestion du parking.

Lors de ce week-end, il y eu des centaines de participants dont la plupart portait un costume de fête ou étaient maquillés, une fanfare qui mettait une ambiance incroyable, une troupe de danse pour animer un spectacle participatif avec les jeunes, une équipe de scoots pour nous aider dans la gestion de l’évènement, des bénévoles en renfort de notre équipe d’organisation (dont mon cousin François pour sa première expérience ABO comme indiqué précédemment) pour guider les participants dans les logements et pendant les animations, quatre grands bus affrétés de Paris, une dizaine d’estafettes et de voitures garées sur un parking immense…

Ce fut pour moi le point d’orgue de ma participation à ABO, une très belle manifestation de ce qu’elle représente : une grande fête collective imprégnée de joie et de bienveillance, chacun y mettait du sien pour que tout se passe au mieux et pour profiter de l’évènement. Malgré le nombre de participants, l’esprit d’ABO pendant les week-ends était maintenu et même amplifié, on pouvait rencontrer des jeunes et des accompagnateurs de toute la France et constater que nous avions la même manière de vivre et de partager ces moments ensemble. Tous ces mois de préparation avec de multiples réunions prenaient désormais formes et c’était beau à voir.

A la fin de ce week-end fabuleux, j’avais le sentiment qu’une page se tournait pour moi avec ABO, j’avais passé beaucoup de bons moments et je m’étais fait de bons amis mais j’aspirais désormais à faire d’autres choses, à prendre plus de temps pour moi, faire du sport, sortir plus souvent avec mes amis, je souhaitais passer à une nouvelle étape de ma vie. ABO venait de fêter ses 30 ans et j’allais lui emboîter le pas quelques mois plus tard.

Ce que ABO m’a apporté

Grâce à ABO, j’ai pu mieux apprendre à connaître et à vivre avec les personnes porteuses de handicap en passant du temps avec elles, en faisant des activités, en lâchant prise parfois, en acceptant de ne pas tout comprendre ou ne pas tout pouvoir expliquer mais en étant avec et en faisant avec elles. Toutefois, je concède que malgré cette expérience je peux encore ressentir parfois des sentiments d’impatience ou même d’impuissance, même si je suis plus habitué et mieux préparé à certaines situations et c’est aussi tout l’intérêt d’être en groupe afin de pouvoir se soutenir et se relayer. C’est pourquoi j’ai aussi beaucoup d’admiration pour les familles qui s’occupent de leurs jeunes tout le long de leurs vies alors qu’avec ABO cela reste le temps d’un week-end.

Ma participation à ABO a été aussi l’occasion de découvrir plusieurs régions sympathiques autour de Paris notamment le Perche, le Vexin, du côté de Chantilly, de Beauvais, dans les forêts de Sologne et du Morvan, ces sorties ABO m’ont permis aussi de prendre l’air le temps d’un week-end, loin de la capitale.

J’ai appris également à conduire l’estafette ce qui n’est pas toujours une mince affaire dans Paris, à cuisiner des plats un peu plus élaborés que des pâtes, à changer des couches, à vivre en communauté pendant tout un week-end, à gérer un groupe, à organiser collectivement des évènements de tous types.

Mon engagement à ABO m’a permis de prendre conscience de la grande force de faire confiance aux jeunes en leur donnant un cadre solide (des valeurs, des connaissances, des références) et un but précis avec du suivi et du soutien quand c’est nécessaire mais tout en leur laissant de l’autonomie pour exprimer leur créativité et prendre des initiatives.

Par ailleurs, j’ai pu constater que le sens de la mission et son utilité concrète pour notre société est une grande source de motivation qui permet à beaucoup de personnes, notamment les jeunes, de s’investir à fond quitte à cumuler avec une autre activité rémunératrice et en étant prêts à faire certaines concessions sur leurs vies pros et persos car c’est une activité qui permet de s’épanouir, de rencontrer d’autres personnes stimulantes dans une émulation positive.

Chers lecteurs et chères lectrices, merci à vous si vous avez eu la patience et l’intérêt de lire jusqu’au bout cet article relativement dense, j’espère qu’il vous a appris des choses ou du moins vous a interrogé, vous a fait prendre conscience de certaines choses, d’autres mondes que nous côtoyons sans que nous ne prenions le temps de les observer.

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Comment je me suis retrouvé dans cette mission

Alors que je continuais mes recherches d’emploi en ingénieur de retour de mon grand voyage (lien blog), mon père m’envoya la photo de la première page du quotidien Ouest France dans lequel il était indiqué en sous-titre : « Baie du Mont Saint-Michel, ostréiculture : les saisonniers manquent à l’appel »

Cela me rappela ma précédente mission de quelques jours de découvertes de l’activité des vendanges en Bourgogne à Chablis pendant le mois de septembre (lien article). Toutefois, je n’avais aucune idée de ce que pouvait être celle de l’ostréiculture qui est moins populaire et je ne savais pas qu’ils avaient besoin de renforts pendant cette période de l’année. Le fait que ce soit une activité en plein air et spécifique à la France située, de plus, dans la fameuse baie du Mont Saint-Michel suscita mon intérêt.

Après de rapides recherches sur internet, je trouvai des annonces pour des missions en intérim de quelques jours dans l’ostréiculture pour faire une activité dénommée « la Marée » sans trop de détails sur les tâches à accomplir. J’appelai une agence d’intérim à Saint-Malo qui me confirma avoir une mission de six jours qui commençait dès la fin de la semaine et qui était située dans la baie du Mont Saint-Michel au Vivier-sur-Mer. J’acceptai tout de suite car, en plus d’expérimenter cette nouvelle activité c’était également l’occasion pour moi de retrouver mes parents qui habitent à Dinard. Je réservai donc mon billet de train.

Pour lire la suite, cliquez sur les boutons ci-dessous.

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Jour 1, samedi 25 novembre 2023 : découverte et apprentissage du métier

Le rendez-vous a été fixé au port du Vivier-sur-Mer à 9h45 soit environ une heure avant la marée basse car il faut le temps pour s’équiper puis se rendre aux parcs de tables à huîtres dans la baie qui peuvent être éloignés de plusieurs kilomètres.

Il me faut environ 1h20 à vélo pour parcourir les 25 kms de Dinard au Vivier-sur-Mer et je prévois de la marge pour le premier jour en partant à 8h. Le ciel sort à peine de l’obscurité, le soleil n’est pas encore levé et il fait un froid mordant. Je n’avais pas vérifié les températures en début de matinée et je pensais naïvement que l’exercice physique allait réchauffer mon corps mais, à peine suis-je parti, que je ressens le froid glacial assaillir mes doigts et faire refluer mon sang.

Trop tard, je suis parti donc je continue, je traverse le barrage à marémotrice de la Rance alors qu’une bande orangée colore peu à peu l’horizon et se reflète sur l’eau du fleuve côtier laissant apparaitre les silhouettes des voiliers amarrés. Tout est paisible, je m’arrête pour immortaliser ce moment et j’en profite pour souffler dans mes mains gelées.

En bordure de la Rance aux aurores

Ensuite, je monte une côte puis je contourne l’agglomération de Saint-Malo en longeant une voie rapide qui ne dispose malheureusement pas de piste cyclable, je dois me contenter de la bordure en restant vigilant aux véhicules qui me doublent puis je rejoins une route moins fréquentée avec une succession de petites collines à franchir.

J’ai les doigts et les orteils gelés, moi qui suis sensible à ce type de douleur je souffre le martyr et je me maudis de ne pas avoir pris de bons gants, ce sera pour la prochaine fois. La distance me parait interminable, j’ai à peine fait la moitié du parcours mais, maintenant que je suis parti, il n’est pas question d’abandonner.

Le ciel est sans nuage et le soleil se lève peu à peu puis, soudain, après avoir quitté le village de Saint-Méloir-des-Ondes situé en haut d’un léger plateau, j’aperçois le soleil lumineux immense et rasant puis, à ma gauche, la baie avec la silhouette du Mont Saint-Michel tout au loin : c’est magnifique !

Vue sur la baie du Mont Saint-Michel depuis les hauteurs de Saint-Méloir-des-Ondes

C’est déjà une belle récompense pour ces efforts, je descends sur Saint-Benoit-des-Ondes au bord de la baie et je suis la route côtière jusqu’au Vivier-sur-Mer. Je croise sur la route des tracteurs qui tirent des remorques avec des chalands pour la Marée, cela me rappelle le temps des vendanges en Bourgogne sauf que les bateaux ont remplacé les bennes à raisins.

Je trouve assez facilement le hangar sur le port qui était indiqué comme lieu de rendez-vous, il est déjà ouvert et certaines personnes attendent devant, probablement des intérimaires comme moi. J’attends avec eux en prenant un bon thé chaud de mon thermos et des biscuits mais personne ne vient nous accueillir, certains intérimaires habitués rentrent dans le hangar et je finis par leur emboiter le pas sans trop savoir quoi faire. Ils m’indiquent où récupérer un scaphandre qui est une sorte de grande salopette imperméable terminée par des bottes, on met un élastique autour de la taille pour bien serrer et éviter que de l’eau s’infiltre par le haut en cas de chute. Il faut aussi prendre des gants pour se protéger des coupures contre les coquilles d’huîtres.

Personne ne vient me voir pour vérifier mon identité, tout est en libre-service, je suis assez surpris en comparaison de l’organisation et de l’accueil pour le début des vendanges mais la différence c’est que l’activité de la Marée a lieu toute l’année donc c’est peut-être plus difficile de maintenir cette organisation.

Nous sommes une dizaine d’intérimaires âgés de vingt à quarante ans dont une seule femme. Une fois que nous sommes équipés, nous attendons devant le hangar et les superviseurs viennent à notre rencontre pour constituer des équipes. Ils nous répartissent deux par deux puis nous montons à bord des bateaux remorqués par les tracteurs. Ces embarcations sont plus petites que des chalands et n’ont pas un fond plat bien qu’elles aient quand même un faible tirant d’eau, on les appelle des « yoles ». Elles ont moins de capacité de chargement que les chalands mais elles coûtent moins chères.

Nous partons vers 10h avec quatre ou cinq bateaux tractés, nous roulons sur l’estran vaseux puis nous rejoignons la mer qui se retire lentement et nous relâchons les bateaux pour naviguer au milieu des parcs d’élevage d’huîtres. Les chefs d’équipes ont chacun une feuille avec les objectifs de la Marée du jour en nombre et en types de poches à prélever, je me demande bien comment ils font pour se repérer dans ce labyrinthe de tables qui se ressemblent toutes et qui sont encore à moitié immergées sans aucuns panneaux d’indication mais apparemment ils ont l’habitude.

Je fais la connaissance de mes compagnons d’équipe qui habitent tous dans le coin, Johan est électricien, Christian travaille dans un bureau d’études, ils s’inscrivent à la Marée quelques jours par mois pour compléter leurs revenus et ils ont l’air de plutôt apprécier cette activité en plein air même si c’est parfois sur leur week-end comme aujourd’hui, au moins ce n’est pas trop long dans la journée (entre 3 et 5h).

Je discute également avec le chef d’équipe, Damien, qui a une dizaine d’années de métier, il songe peut-être un jour à travailler dans un domaine avec un rythme plus stable pour fonder une famille car les horaires et les jours de travail varient en fonction des marées y compris les week-ends et parfois très tôt le matin. Damien me parle aussi de l’importance d’avoir une bonne maintenance du matériel car il y a peu de créneaux de grandes marées pour la pêche aux huîtres et, si un moteur de bateau ou de tracteur tombe en panne, cela peut limiter fortement la capacité donc ils ont leurs propres mécanos dans l’entreprise.

Pour ce premier jour de Marée, lorsque nous arrivons à proximité des tables des lots de poches sélectionnés, les superviseurs coupent le moteur et nous nous jetons à l’eau qui nous arrive au niveau du haut des cuisses pour pousser l’embarcation. Puis, nous enlevons les élastiques en caoutchouc qui maintiennent les poches sur les tables et ensuite nous maintenons la yole bien parallèle à la table tout en avançant doucement pendant que les superviseurs « pêchent », c’est-à-dire que l’un est dans l’eau pour soulever les poches de la table une à une et les placer sur le rebord de la yole tandis que l’autre est dans la yole et pose en tas les poches sur des arceaux en fer appelés « berceaux » en s’assurant de bien tasser les poches qui s’empilent afin qu’elles ne tombent pas et de bien équilibrer le poids dans le bateau pour qu’il ne penche pas trop d’un côté.

Nous poussons la yole en parallèle d’une table tout en chargeant les poches dans la yole

Le temps est radieux, désormais il fait bon et je n’ai plus froid même en étant dans l’eau car le scaphandre protège bien. On peut voir le Mont Saint-Michel au loin, je suis très content de découvrir cette activité dans ce lieu si unique et avec cette belle météo, merci Papa !

Lorsque la yole est chargée de poches (entre 200 et 250), nous nous écartons du parc et nous rallumons le moteur pour rejoindre la remorque et le tracteur qui nous permettent d’accéder à des tables plus proches du rivage qui sont complètement à sec pendant la marée basse. Elles servent d’entrepôts pour les poches à huîtres sélectionnées avant d’être triées et conditionnées dans le hangar.

Pour cette tâche, c’est plus physique, le superviseur conduit le tracteur pendant que nous déchargeons les poches sur les tables puis nous les fixons avec des élastiques. Cet effort a duré probablement une vingtaine de minutes mais j’ai déjà des douleurs au niveau du dos car les poches doivent peser une dizaine de kilos pour une taille d’environ un mètre de long et cinquante centimètres de large et les tables sont basses, elles sont situées au niveau de mes genoux.

« L’entrepôt » pour stocker les poches d’huîtres à proximité du rivage avant d’être préparées pour la vente

Après cela, notre mission est terminée, nous rentrons au hangar pour un total de 3h30 de travail en incluant les trajets en tracteur et en bateau donc c’est largement supportable. J’aurais quasiment fait autant de vélo ce jour-là que de mission d’intérim car je repartirai à vélo accompagné de mon père qui m’a rejoint.

Nous rinçons les scaphandres puis nous rangeons les équipements avant de nous changer. Au moment de signer la feuille d’émargement, je constate que je m’appelle Yann B. sur la liste, mon contact de l’agence d’intérim ayant sans doute oublié mon prénom et, dans le doute, m’a donné un prénom populaire de la région, il ne me manquait plus qu’un « Ker » ou un « Le » devant mon nom de famille pour devenir un vrai breton 🙂

Jour 2, dimanche 26 novembre 2023 : rodage

Cette fois-ci, je suis mieux équipé que la veille pour le trajet à vélo avec de bonnes moufles et j’avance à un bon rythme, je commence à être rodé, l’heure de rendez-vous est une heure plus tard que le jour précédent pour être en phase avec la marée.

Je retrouve les collègues d’intérim devant le hangar, on discute, certains sont dans la restauration en tant que serveurs ou cuisiniers et ils complètent leurs revenus en attendant la haute saison. Ils m’apprennent que nous aurons ce jour-là une majoration de 20% car c’est dimanche, ce que je trouve peu élevé en comparaison du secteur du tri des colis en zone aéroportuaire dans lequel j’ai travaillé précédemment mais cela restait une activité limitée et exceptionnelle alors que pour la Marée c’est assez fréquent.

J’enfile le scaphandre et les gants qui sont déjà mouillés alors qu’il y a un vent glacial qui souffle à l’extérieur, même avec ces équipements j’ai froid. Au moins il ne pleut pas même si le ciel est couvert.

Nous retournons dans le parc loin du rivage en direction de Cancale, il y en a pour une bonne vingtaine de minutes de trajets avec le tracteur puis la yole. Lors du trajet, je fais la connaissance de mon nouveau binôme, Yann, issu de la grande diaspora bretonne en région parisienne et désormais de retour au pays. Yann a la quarantaine, il travaillait dans la restauration puis il a acheté un bar qu’il a finalement revendu après quelques années pour désormais alterner des missions en intérim avec d’autres activités en partenariat avec sa femme.

Comme la veille, nous tenons et poussons la yole pendant que les superviseurs chargent les poches des lots indiqués. Le temps presse car la marée continue de descendre et nous devons terminer de charger toutes les poches d’une table sur notre yole tout en évitant qu’elle s’enlise dans la vase. L’embarcation devient difficile à déplacer, on a l’impression de pousser dans une mêlée au rugby mais l’avantage c’est que lorsqu’on est en mouvement on a moins froid.

Aujourd’hui, les huîtres sont à amener directement au hangar pour être nettoyées puis triées suivant leurs tailles et il en faut une grande quantité donc, lorsque notre yole est remplie, nous transbordons la cargaison sur un grand navire amphibie à proximité du parc afin de pouvoir plus rapidement retourner à la pêche. Le bateau amphibie peut se déplacer dans l’eau à l’aide de roues, il dispose d’un large pont plat avec un grand bras mécanisé avec des chaines et des crochets à son bout afin de transborder les berceaux contenant les poches d’huîtres.

Le bateau amphibie pour transborder les berceaux d’huîtres à l’aide d’un bras mécanisé

Pendant qu’une équipe se charge du transbordement sur le navire amphibie, je reste les pieds dans l’eau dans le parc avec d’autres et nous tapons les tables avec des barres de fer pour enlever les huîtres sauvages et le dépôt qui recouvrent l’armature des tables, c’est l’occasion de discuter tout en travaillant et certains me font quelques confidences sur leur vie privée, pas vraiment pour me demander conseil mais plutôt pour évacuer leurs ressentis sachant que l’on ne se reverra probablement pas. Le travail, c’est aussi du social.

Puis, lorsque la yole revient, c’est à mon tour de pêcher alors que la marée remonte donc il ne faut pas traîner car après on ne verra plus les tables. C’est un effort court d’une vingtaine de minutes mais c’est intense, j’ai déjà mal au dos.

Nous terminons la mission de Marée après environ 4h d’activité et Yann me propose gentiment de m’avancer sur le trajet retour en chargeant mon vélo dans son Kangoo ce qui me permet de diviser par deux la distance à parcourir à vélo, c’est un bel exemple de solidarité entre travailleurs.

Jour 3, lundi 27 novembre 2023 : météo et ambiance tempétueuses

Ce lundi, il pleut dès le matin mais je suis bien équipé et en bonne forme donc le trajet en vélo ne me dérange pas, désormais je connais bien l’itinéraire et notamment le nombre exact de côtes à franchir.

En arrivant au hangar, je découvre en pleine activité l’équipe en charge de vider, trier et conditionner les huîtres que nous avons pêchées la veille dans l’estran. Tout d’abord, ils ouvrent les poches puis ils les vident à l’entrée d’un tapis mécanisé qui nettoient les huîtres puis les trient suivant leur gabarit (la taille des huîtres détermine leur catégorie, plus le numéro de la catégorie est faible plus le poids et donc le gabarit de l’huître est élevé) avant de les déposer dans des caisses qui sont ensuite entassées par des opérateurs.

Il y a également des opérateurs en milieu de chaîne de tri qui s’assurent de la qualité en décollant les huîtres agglutinées les unes sur les autres ou en retirant les coques ou autres intrus. C’est une vraie petite usine.

Les caisses d’huîtres seront ensuite stockées dans des bassins avant d’être éventuellement vendues en vrac dans une poissonnerie ou bien elles pourront également être reconditionnées dans des contenants plus petits telles des « bourriches » qui sont des petites caisses en bois pour être vendus aux particuliers.  

Aujourd’hui, nous devons prendre une voiture pour nous rendre dans un parc éloigné qui est tout proche de Cancale car nous ne pouvons pas rester dans les remorques sur la route. C’est l’occasion pour moi de faire connaissance avec deux nouveaux collègues, Le premier, Matéo, est étudiant en BTS en cultures marines et le second est un ancien cadre de santé qui s’est reconvertit en gérant de gites tout en gardant une activité partielle de psychomotricien et en complétant avec de l’intérim dont il apprécie la flexibilité et aussi le fait que les types de missions sont simples à effectuer, il suffit de suivre les directives alors que dans son travail précédent de cadre, le stress et les nœuds aux cerveaux le suivaient souvent à la maison. Ce n’est pas le premier à me faire part de ce type de problématiques, on trouve vraiment des profils différents dans les missions de Marée comme pour les vendanges.

Matéo m’explique que cette période est cruciale pour l’activité de l’entreprise car les ventes pendant les fêtes de Noël représentent quasiment un tiers de son chiffre d’affaires annuel. Il faut donc arriver à pêcher la bonne quantité de poches d’huîtres cette semaine car ce n’est pas sûr qu’il y ait une autre grande marée avant les fêtes, les enjeux sont importants. J’apprends également que la société qui nous fait travailler est une entreprise familiale qui a étendu ses activités à l’ensemble de la chaîne de l’ostréiculture depuis la conception de larves dans des écloseries jusqu’aux magasins de ventes aux particuliers en passant par les parcs de pêche et les hangars de tri.

En arrivant au parking, nous enfilons nos scaphandres et nous montons dans les yoles remorquées par les tracteurs qui nous ont suivi sur la route, il y en a six en tout donc cela fait une grosse équipe. Nous attendons un moment sous la pluie en file indienne dans l’estran avant que la marée soit suffisamment basse pour apercevoir les tables et les rejoindre avec les yoles.

Nous attendons dans l’estran que la marée descende suffisamment pour pouvoir pêcher

Les superviseurs semblent plus tendus que les jours précédents, leurs ordres fusent un peu sèchement, on sent que les objectifs sont élevés et qu’il ne faut pas traîner avec le peu de temps que nous laisse la marée donc j’essaye de suivre le rythme alors que la pluie redouble.

Même la simple tâche d’enlever les élastiques pour libérer les poches des tables peut devenir difficile à cette cadence car souvent des huîtres sauvages sont collées dessus au niveau des piquets et il faut forcer ou taper dessus pour libérer les élastiques mais c’est peu d’efforts par rapport à la pêche effectuée bien souvent par les superviseurs. Je le constaterai en pêchant plus tard une table entière de poches, des douleurs au bas du dos se feront rapidement sentir. Ce n’est pas évident non plus de déplacer la yole au rythme du pêcheur car il faut la garder bien parallèle à la table, ni trop proche ni trop près tout en la déplaçant à la bonne vitesse mais c’est moins physique.

Lorsque la yole est pleine, le superviseur lance le moteur tandis que nous poussons la yole puis il faut se jeter rapidement dedans alors que l’on a peu d’espace avec les tables autour et les berceaux pleins dans la yole. Soudain, le moteur cale et, après plusieurs tentatives infructueuses, il faut se jeter à l’eau pour retenir la yole afin d’éviter de percuter les tables. Nous devons répéter cette opération par trois fois ce qui provoque la fureur de notre chef d’équipe qui nous engueule pour se défouler, ses instructions deviennent confuses mais nous n’osons plus poser de questions, chacun a droit à ses remontrances, on fait le dos rond en attendant que l’orage passe.

Le moteur finit par redémarrer et nous parvenons à rejoindre enfin le bateau amphibie pour décharger notre cargaison puis récupérer des berceaux vides afin de remplir à nouveau notre yole puis nous repartons vers le parc tandis que la pluie alterne régulièrement avec le soleil, un vrai temps breton

C’est alors que le moteur d’une autre yole tombe en panne, c’est la cata dans le groupe, « mais pourquoi ils ont pas vérifié les moteurs, putain ?! », les superviseurs s’engueulent entre eux, nous autres intérimaires faisons profil bas en nous concentrant sur les instructions. Finalement, nous parvenons quand même à charger une yole alors que la marée remonte puis il faut décamper en vitesse.

A ce moment, il y a un magnifique arc en ciel aux couleurs très vives qui part de Cancale et qui rejoint le Mont Saint-Michel en enjambant toute la baie. J’enlève un gant pour prendre une photo afin d’immortaliser ce moment magnifique mais un superviseur me retient, dommage, il vous faudra faire preuve d’imagination.

Nous poussons les yoles remplies de poches à travers les tables en nous rapprochant du rivage pour rejoindre les remorques mais il y a de moins en moins de fond donc nous risquons de nous enliser. Nous redoublons d’efforts pour avancer mètre par mètre puis nous faisons un détour vers le large afin d’avoir plus de fond et faciliter les mouvements.

Tout le monde s’active, les superviseurs hurlent des ordres et se lancent des jurons au milieu des crépitements des moteurs tandis que la pluie se remet à tomber drue, on se croirait dans une bataille en mer. Puis nous finissons par attacher notre yole à la remorque et nous rembarquons, c’est fini. Désormais le silence règne dans l’équipe mais il va sans doute y avoir un débrief tendu entre superviseurs car nous n’avons pas atteint les objectifs à cause des pannes moteurs.

Fin de mission Marée sur la yole avec Yann, on garde le sourire

Pour une mission de 4h nous aurons été vraiment actifs un peu plus de la moitié du temps car les trajets sont longs mais, lorsque l’on travaille, c’est intense avec des cadences rapides et dans des conditions parfois difficiles avec la météo.

Cette fois-ci, mon scaphandre n’a pas été parfaitement étanche, j’ai les jambes et les pieds trempés mais je ne m’en suis pas rendu compte pendant l’action. Je suis bien content que Yann puisse me rapprocher en voiture de chez mes parents puis c’est mon père qui vient gentiment me chercher, je n’avais pas la motivation de continuer à vélo avec cette météo.  

Jour 4, mardi 28 novembre : on termine en beauté sans le savoir

Pour ce quatrième jour de Marée, le temps est doux et mon trajet en vélo est presque une balade. La silhouette du Mont Saint-Michel que je cherche toujours du regard au loin dans l’horizon m’est devenu familière, cette fois-ci je peux la distinguer nettement car il n’y a pas de brume mais mon téléphone n’est pas assez puissant pour que vous puissiez le voir nettement sur les photos.

La baie avec le Mont Saint-Michel tout au loin

En arrivant au hangar, j’ai ma petite routine en commençant par un thé chaud de mon thermos et des biscuits puis je choisis un scaphandre et des gants à ma taille en vérifiant qu’ils ne soient pas troués ni humides à l’intérieur. L’heure du rendez-vous continue d’être décalé en fonction de la marée et aujourd’hui c’est à midi.

Nous retournons en voiture au même endroit que la veille, près de Cancale. On sent que l’ambiance est apaisée, les superviseurs sont calmes, les moteurs tournent, il fait beau et les températures sont douces, tout va bien.

Nous faisons un trinôme avec Yann et Damien, un des superviseurs que nous commençons à bien connaitre avec le temps et cela fonctionne parfaitement entre nous, tout se passe de manière fluide, les instructions sont claires, chacun fait de son mieux pour aider l’équipe en restant concentré et en alternant les tâches difficiles sans que cela nous empêche de nous lancer quelques plaisanteries pour maintenir la bonne humeur.

La pêche reprend dans la bonne humeur

Certaines poches contiennent des huîtres toutes petites, elles sont sans doute mortes ou atteintes d’une maladie, c’est un cas similaire aux vendanges où l’on pouvait trouver des grappes de raisins rachitiques ou tout noir, l’essentiel est que cela reste une exception. Autre parallèle avec les vendanges, on peut aussi se faire de petites entailles au niveau des doigts même avec les gants car les coquilles d’huîtres sont très coupantes donc il faut faire des gestes prudents et mesurés.

Nous croisons dans le parc des pêcheurs de bouquets (des crevettes sauvages), ils sont vêtus de grands pantalons et de cirés jaunes imperméables et ils remontent à pied les rangées de tables en ouvrant grand devant eux un filet épuisette. Ce sont en général des retraités du coin, ils nous adressent un geste amical de la main et affichent de larges sourires sur leur visage en passant, cela semble une activité plaisante.

Nous croisons des pêcheurs de bouquets (crevettes) en cirées jaunes

Nous parvenons à faire notre quota de poches pour la journée à savoir une yole pleine déchargée sur le bateau amphibie puis une autre yole remplie à moitié que nous ramenons sur la remorque et tout cela sans pluie ni vent, des conditions parfaites.

En tant qu’ingénieur, je ne peux m’empêcher de penser à des moyens plus efficace nécessitant moins d’efforts humains comme par exemple des embarcations avec un bras articulé qui puisse soulever les poches et les ranger à l’intérieur  tout en ayant un système de guidage automatique pour se déplacer entre les tables sans les heurter, en tenant compte des marées et de la localisation des lots à prélever mais c’est peut-être trop d’investissements pour un rendement faible et puis, en attendant, cela permet de maintenir de l’emploi local dans un cadre unique !

De plus, comme pour les vignes, je constate que les parcs à huîtres sont heureusement difficilement délocalisables car la qualité de leurs produits dépend de facteurs naturels spécifiques à certaines régions françaises contrairement aux usines donc cela permet de maintenir ces activités ancestrales emblématiques de la France.

En revenant au hangar, je n’ai pas vraiment l’impression d’avoir travaillé aujourd’hui même si cela a été aussi physique que les jours précédents, les conditions météos étaient tellement bonnes avec une ambiance détendue dans l’équipe et dans un cadre naturel aussi magnifique que je n’ai pas vu le temps passer, cela donne envie de continuer.

Toutefois, sur le chemin du retour en voiture avec Yann, celui-ci reçoit un appel de son agence d’intérim qui lui apprend que la Marée des deux prochains jours est annulée car ils ont fait leur quota. Nous sommes surpris car nous pensions qu’il y avait encore du boulot notamment du fait des objectifs non atteints de la veille et on ne nous avait rien dit en partant. Nous sommes donc un peu déçus d’être prévenus comme cela par téléphone au dernier moment mais c’est comme ça l’intérim, d’un côté la flexibilité et la possibilité de commencer un contrat rapidement mais aussi le risque qu’il s’arrête subitement, on aura quand même terminé notre mission sur une belle journée.  

Le lendemain, je pars acheter avec mon père quelques douzaines d’huîtres dans un magasin appartenant à l’entreprise familiale avec laquelle j’ai fait la Marée puis nous dégustons à la maison ces mollusques avec mes parents, accompagnés par du bon vin blanc de Chablis en souvenir de mes vendanges et ils se marient parfaitement ensemble.

Dégustation d’huîtres de la baie du Mont Saint-Michel accompagnées par du vin blanc de Chablis

Désormais, je peux mieux visualiser les efforts et toute l’organisation nécessaires pour créer, élever, pécher, conditionner et livrer ces produits de la mer afin que nous puissions les déguster chez nous ou au restaurant et j’espère que c’est également plus clair pour vous à la lecture de cet article !

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C’est quoi « la Marée » et l’ostréiculture

Autant l’activité des vendanges était assez claire pour moi, concernant l’ostréiculture et particulièrement « La Marée » je n’avais aucune idée de ce dont il s’agissait. Dans l’annonce d’emploi il était indiqué que l’entreprise me prêterait un scaphandre : est-ce qu’il faudrait aller sous l’eau pour aller pêcher les huîtres ? 

Donc, avant de commencer cette nouvelle mission, je me renseignai sur l’ostréiculture via différents articles sur internet ainsi que d’une vidéo de nos célèbres vulgarisateurs Fréd et Jamy dans l’émission « C’est pas sorcier ». J’y appris notamment que la Chine est le premier producteur mondial d’huîtres (80%) suivie par le Japon, la Corée du sud, les Etats-Unis et enfin la France qui représente à elle seule 90% de la production européenne. Historiquement, les côtes françaises de la façade atlantique étaient riches en bancs naturels d’huîtres sauvages plates qui étaient pêchées et dégustées depuis l’Antiquité mais la surconsommation les a menacées d’extinction et il n’en subsiste plus que dans quelques baies bretonnes, notamment du côté de Cancale.

Pour répondre à cette pénurie d’huîtres au milieu du XIXème siècle, de nouvelles techniques d’élevages furent développées (c’est le début de l’ostréiculture), des huîtres creuses du Portugal furent importées pour reconstituer les stocks et la pêche fut autorisée seulement pendant les mois en « r », c’est-à-dire de septembre à avril afin de préserver les huîtres en été pendant leur période de reproduction.

Cependant, les huîtres élevées sur les côtes françaises furent à nouveau décimées, cette fois-ci par un virus à la fin des années 60 et, finalement, ce furent des huîtres creuses du Japon qui furent sélectionnées pour les remplacer car elles s’acclimataient très bien aux conditions de la côte atlantique française et elles avaient bon goût. Désormais, elles représentent la majorité des huîtres élevées en France.

Les huîtres d’origine naturelle se reproduisent pendant l’été lorsque les températures sont plus élevées en relâchant des spermatozoïdes pour les mâles et des gamètes pour les femelles (à noter que les huîtres peuvent changer de sexe) qui formeront ensemble des larves avant de se développer en huîtres. Pendant cette période de reproduction, elles sont dites laiteuses car elles contiennent leur semence, leur goût est différent mais elles restent comestibles.

Depuis les années 2000, afin de gagner en efficacité, des huîtres dites « triploïdes » furent conçues artificiellement par croisements pour qu’elles ne puissent pas se reproduire afin que toute leur énergie soit dédiée à leur croissance. Ainsi, elles se développent plus rapidement que les huîtres naturelles, elles ne sont jamais laiteuses et elles peuvent être consommées en toutes saisons avec le même goût.

Par conséquent, il n’y a quasiment plus d’huîtres sauvages ni d’origine naturelle en France, elles sont élevées dans de grands sacs grillagés en plastique rigides appelés « poches » qui sont disposés sur des sortes de tréteaux métalliques appelés « tables » dans l’estran d’une baie (la partie qui est à sec pendant la marée basse) pour être brassées par les mouvements de marées et nourries au plancton. Les poches d’huîtres sont retournées régulièrement pour permettre la bonne croissance de ces mollusques (et non, ce ne sont pas des fruits de mer).

Après deux ou trois ans d’élevage dans la baie, il est temps de « pêcher », c’est-à-dire que les poches d’huîtres sont retirées des tables pour être acheminées vers le rivage à l’aide de bateaux à faible tirant d’eau et à fond plat (appelés chalands) pendant les périodes de grandes marées car cela laisse plus de temps pour cette activité qui est donc appelée « La Marée ».

Voilà pour l’historique et la théorie de l’ostréiculture, passons maintenant à la pratique !

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Vendanges en Bourgogne

Pourquoi j’ai fait cette expérience

Après un long voyage de plusieurs mois à travers l’Asie et l’Océanie (lien blog), j’étais de retour l’été 2023 en France pour retrouver ma famille et mes amis ainsi que pour chercher un nouveau travail, ayant démissionné du précédent. Les recherches étant assez calmes en cette période, j’avais donc du temps libre et, lors d’une discussion pendant un repas avec un ami de ma famille, celui-ci me raconta avoir fait les vendanges dans sa jeunesse et qu’il en gardait un bon souvenir. Cela résonna en moi, je me souvins également d’un ex collègue qui avait fait les vendanges pendant ses congés alors qu’il occupait un poste à responsabilité et qu’il avait la quarantaine passé, cela m’avait surpris qu’il consacre du temps pendant ses jours de vacances à une activité aussi physique. Mon ami Vincent l’avait également fait quelques jours pendant ses congés et chacun d’entre eux m’en avaient dit du bien donc cela m’intriguait, j’avais envie à mon tour d’en faire l’expérience.

De plus, c’est une activité très typique de notre pays mondialement connu pour ses bons vins et c’était l’occasion pour moi de faire de l’exercice en plein air au milieu de belles vignes tout en étant payé. Donc, je parlais de mon idée à Vincent qui m’encouragea dans cette voie et m’envoya plusieurs annonces pour faire les vendanges dans les environs de la ville de Chablis en Bourgogne où son père habite en m’indiquant qu’il pourrait m’héberger. En consultant les nombreuses annonces, je constatais qu’il y avait une forte demande de main d’œuvre et qu’il n’était pas nécessaire d’avoir de l’expérience dans ce domaine, il suffisait simplement d’être motivé et de fournir les copies d’une pièce d’identité, d’un RIB et d’une carte vitale.

Je ne me sentais pas de faire plusieurs semaines de vendanges car ma priorité était de retrouver un travail rapidement en tant qu’ingénieur donc je filtrais sur les annonces prévoyant une semaine de vendanges. L’une d’entre elles m’intéressa davantage car le repas du midi était offert sur place ainsi que des collations tandis que la plupart demandaient à ramener sa gamelle et son eau. Je trouvais que c’était plus convivial de partager un repas ensemble et je ne faisais pas les vendanges pour l’argent mais plutôt pour découvrir cette activité et rencontrer les gens qui la font.

Il s’agissait du Domaine du Château Grenouilles, un grand crus de Chablis. J’appelais pour avoir plus de renseignements et la personne au bout du fil fut très aimable. De plus, le frère de Vincent avait fait les vendanges dans ce domaine il y a quelques années et il en gardait de très bons souvenirs donc j’optais pour ce choix-là. Mon inscription fut très rapide et ils acceptèrent que je fasse seulement quatre jours sur les sept initialement prévus à cheval sur deux semaines. De toute façon, il n’y aurait pas de fête de fin de vendanges organisée par le domaine, la « peulée » (appelée également « paulée » dans d’autres régions) qui est un grand repas arrosé de vins pour célébrer la fin des vendanges mais, apparemment, ce type de tradition se perd ou alors il faut choisir un domaine plus familial. D’ailleurs, je vous recommande le film de Cédric Klapisch « Ce qui nous lie » qui raconte une belle histoire de famille autour de la vigne en Bourgogne.

Rencontre avec mon hôte et découverte des vendanges

Donc, je fus de retour sur les routes avec ma fidèle moto en direction du village Dannemoine où je rejoignis le père de Vincent qui allait m’héberger pendant les vendanges. Monsieur Morin m’accueillit chaleureusement autour d’un bon apéritif avec du crémant de Bourgogne et des Gougères, ce sont des sortes de gros choux à la crème mais salés, avec du Comté gratiné dessus : c’est excellent ! J’interrogeai mon hôte sur la recette de ces fameuses Gougères qui sont une spécialité locale et il me livra tous les détails avec passion, c’est tout un art et toute une histoire la cuisine française. Il y a de nombreux détails qui font la différence pour la préparation et la cuisson de chaque ingrédient, la chronologie des étapes à suivre, c’est passionnant même si je concède que, lorsque je suis aux fourneaux, j’ai parfois une patience limitée pour suivre à la lettre toutes les indications, préférant parfois me fier à mon instinct et à mon inspiration du moment suivant ce qu’il me reste à disposition.

Après un bon repas où le père de Vincent me raconta l’histoire de sa famille entremêlée à celle de la Bourgogne, je partis me coucher tôt car le rendez-vous pour le premier jour des vendanges était à 7h30 et j’avais une vingtaine de minutes de route à moto. Cela faisait longtemps que je ne m’étais pas levé aussi tôt pour aller travailler !

Au réveil, il faisait encore sombre, je partis un peu en avance pour bien repérer les lieux. On m’accueillit au domaine du Château Grenouilles en me proposant un café et un gâteau. Mon contrat de travail était déjà prêt, je n’avais plus qu’à signer la feuille d’émargement. Nous étions environ trente vendangeurs, un peu moins que les années précédentes apparemment car la main d’œuvre est plus difficile à trouver en ce moment.

Notre groupe était répartit en cinq équipes de cinq cueilleurs avec un sceau et un sécateur chacun et cinq porteurs avec leur hotte sur le dos. Les porteurs étaient rémunérés un peu plus que les cueilleurs car c’est un travail jugé plus physique (14€ de l’heure versus 12 € pour les cueilleurs) même si l’activité de cueilleur implique des postures qui ne sont pas non plus agréables pour le corps en courbant le dos et en fléchissant les jambes constamment. Il y avait également deux superviseurs qui nous donnaient des instructions, contrôlaient la qualité de notre travail et participaient de temps en temps à la cueillette quand c’était nécessaire. De plus, un agriculteur se chargeait de conduire le tracteur avec une remorque qui supportait la benne dans laquelle les porteurs vidaient leurs hottes remplies de grappes de raisins. Lorsque la benne était pleine, le conducteur la ramenait avec le tracteur au bâtiment du domaine où elle était vidée sur un tapis afin de retirer à la main les feuilles et les raisins malades, le reste étant broyé pour en retirer le précieux jus qui serait stocké dans des cuves ou dans des fûts de chênes pour les meilleurs vins en suivant des procédés que je ne connais pas dans les détails.

J’appris le terme de « treille » qui désigne une rangée de vignes. Nous avions de la chance avec la météo car la canicule était passée et il faisait relativement bon dans la matinée mais, lorsque le soleil était haut en début d’après-midi, on transpirait à grosses gouttes. Allez, il fallait s’y mettre, on arrachait quelques feuilles de vignes afin de pouvoir mieux couper les grappes avec le sécateur puis on les déposait dans notre sceau et on remontait la « treille » progressivement en tâchant de ne pas oublier de grappes car c’est du grand cru, ce serait dommage d’en gâcher ! Chaque cueilleur était généralement assigné à une treille et, lorsqu’il avait fini, il allait aider ceux qui n’avaient pas terminé avant de passer à une autre rangée de vignes. On se rendait aux parcelles à pied car elles n’étaient pas très éloignées, certaines étaient légèrement en hauteur sur les côteaux, offrant une jolie vue sur la plaine de la ville de Chablis avec son beau clocher d’église qui se dresse au centre. Il y a huit hectares en tout sur le domaine du Château Grenouilles, principalement sur les côteaux face à Chablis, orientés sud. Les vendanges pour les grands crus se font obligatoirement à la main pour préserver la qualité du raisin tandis que les autres vignobles, qui représente la majorité, utilisent des machines.

Le début des vendanges

Nous eûmes rapidement nos premiers blessés dans notre groupe mais heureusement rien de grave, c’étaient de légères coupures au doigt avec le sécateur, généralement on mettait un pansement et cela cicatriserait rapidement. Mes mains se noircissaient petit à petit au contact des vignes et mes bras, ainsi que mes jambes, se couvraient de petites boules qui s’accrochaient à mes poils. En retirant des feuilles, on découvrait parfois des araignées ou des lézards tout surpris de notre remue-ménage. En simple amateur, je trouvais que les raisins étaient globalement en bon état même si certains semblaient atteints de maladies ou trop mûrs, on les prenait quand même et le tri serait fait plus tard sur le tapis par des employés qualifiés. Je cherchais constamment une posture la plus confortable possible, m’asseyant par terre quand il y avait beaucoup de grappes à proximité pour reposer mon dos. A certains endroits, il y avait de belles et grosses grappes de raisins faciles d’accès dont il suffisait simplement de couper l’extrémité pour qu’elles tombent directement dans le sceau mais, parfois, il fallait fouiller scrupuleusement et se contorsionner pour récupérer quelques grappes minuscules coincées entre les pieds de vignes et les fils de fer. Certaines portions de treilles n’avaient même pas de raisins, le terrain étant trop accidenté et remplis de cailloux, il faudrait arracher les pieds de vigne et en replanter plus tard pour la prochaine saison. Mais, au global, la récolte semblait plutôt bonne cette année, comme l’année précédente, avec un total d’environ cinq tonnes pour la première journée.

Les profils des vendangeurs que j’ai rencontrés

Il y avait de tous les âges dans notre groupe de vendangeurs, de 18 à … 64 ans ! Oui, oui, Michel était à la retraite après avoir vendu son bistrot alors qu’il travaillait depuis tout jeune mais il faisait quand même les vendanges pour, comme il dit, « mettre du beurre dans les épinards » car une journée de vendanges « cela permet de remplir un Caddie chez Leclerc ». Il y avait d’autres vendangeurs qui avaient également bien passé la cinquantaine et ils n’étaient pas les moins efficaces au travail.

Environ deux tiers des vendangeurs avaient entre 18 et 40 ans, il n’y avait pas de nationalités étrangères dans notre équipe mais on pouvait voir dans les vignes alentours d’autres profils de travailleurs aux conditions qui semblaient plus précaires, faisant parfois de plus longues journées de travail que nous et certains étant rémunérés au poids des récoltes plutôt qu’à l’heure. Nous avions rencontré notamment une famille entière de gens du voyage d’une bonne cinquantaine de personnes avec les jeunes enfants qui regardaient leurs cousins, oncles, tantes et parents qui faisaient les vendanges sous la supervision de quelques ouvriers du domaine.

Je fis progressivement connaissance avec mes camarades de vendanges aux profils variés : les plus jeunes étaient généralement encore dans les études alors que les plus âgés avaient souvent une autre activité mais qui ne représentaient pas un temps plein ou qu’ils ne faisaient pas toute l’année.

Kevin était cuisinier saisonnier se déplaçant avec son van et son chien dans différentes régions suivant les opportunités, son corps était couvert de tatouages, il avait une barbe bien taillée et les cheveux dressés vers le haut tandis que les côtés étaient rasés de près, un vrai look de musicien de rock punk, il était très sympathique. Mikaël était technico-commercial en congé sabbatique, il ne se ménageait pas pour porter la hotte entre les treilles tout en coupant des grappes avec son sécateur pour aider les cueilleurs, belle solidarité.

Charlotte avait eu une carrière d’acrobate équestre dans des spectacles de cirques puis elle s’était reconvertie en tant que monitrice d’équitation, artiste équestre et elle s’occupait également des chevaux quand leurs maitres n’étaient pas là. Elle avait l’habitude des vendanges, ayant vécu longtemps en Champagne donc elle était très efficace à la cueillette tout en diffusant de la musique avec son enceinte portable pour motiver le groupe. Charlotte avait de la gouaille avec une voix un peu enrouée mais qui portait, elle mettait de la bonne humeur dans le groupe en chambrant gentiment ses camarades à proximité.

Bonne ambiance de groupe

L’ambiance dans notre groupe était bonne, on pouvait se parler tout en travaillant, plaisanter, il y avait quelques grandes gueules qui aimaient bien plaisanter, c’était sympa, une ambiance bon enfant. J’appréciais beaucoup cet environnement de travail en équipe et en plein air, il y avait une vraie convivialité entre nous sans que cela soit au détriment de la qualité de notre travail, cela renforçait même notre motivation, nous étions prêts à nous entraider quand il le fallait. Bien entendu, il y avait quelques tire-au-flanc mais la plupart ne revenaient pas après une ou deux journées de travail et ils étaient généralement gentiment rappelés à l’ordre par les superviseurs ou même par leurs camarades de vendanges car c’est une activité collective.

Quand nous vendangions près de la route, certains touristes s’arrêtaient pour nous prendre en photo ou des vendangeurs d’autres domaines nous klaxonnaient en nous faisant un salut amical de la main auquel nous répondions d’une joyeuse exclamation en levant le bras quand nous en avions l’envie, j’avais l’agréable sensation de me sentir faire partie d’un groupe qui pratiquait une activité utile et reconnue par les gens du coin et au-delà.

Je fus très surpris de voir autant de vendangeurs fumer comme des pompiers quel que soit leur âge, ils faisaient la cueillette ou portaient la hotte tout en ayant la clope au bec pendant plusieurs heures d’affilée. Visiblement, cela les aidaient à passer le temps et puis c’est difficile à arrêter quand on en a pris l’habitude.

Des horaires matinaux pour éviter les fortes chaleurs

Les premiers jours, nous commencions les vendanges à 8h puis nous faisions une pause déjeuner à midi pour reprendre à 13h jusqu’à 16h. Ensuite, avec le retour des fortes chaleurs, nous commencions trente minutes puis une heure plus tôt avec une courte pause vers 11h pour manger rapidement des sandwichs puis reprendre les vendanges jusqu’à 14h.

Sur la route qui me menait aux vendanges à l’heure des aurores, j’assistais à de magnifiques levers de soleil illuminant progressivement les vignes. C’était magnifique et apaisant, loin du tumulte et du vacarme de la région parisienne.

Prise de conscience du coût de la vie avec un SMIC

Pour être franc, je ne faisais pas ce travail pour gagner de l’argent, ayant eu la chance et l’opportunité d’avoir précédemment un travail bien payé qui m’a permis de mettre de côté pour un temps, mais plutôt par curiosité pour cette activité et les gens qui la font, pour la grande majorité d’entre eux, par nécessité. Le fait d’être payé au smic avec une majoration de 10% pour les congés soit 12€ de l’heure me permettait de prendre davantage conscience du coût de la vie quand on a cette paie. Désormais, je convertissais mes dépenses de la vie de tous les jours en nombre d’heures de travail : le péage pour Paris, une heure de travail, un plein d’essence à moto, deux heures trente de travail, une caisse de bons vins de Chablis en souvenirs, deux journées de travail. Dans ce cas, les économies partent rapidement et en plus j’avais la chance pendant ce séjour d’être nourri et logé sur place sinon cela ne serait pas intéressant financièrement à moins de camper.

Voilà, c’est la fin de mon récit sur ma découverte des vendanges, j’espère que cela vous a intéressé et n’hésitez pas à en faire l’expérience par vous-même dans l’une des nombreuses régions viticoles de notre beau pays !

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